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Covid-19, des étudiants du monde témoignent #13 : Les Pays-Bas confiants mais inconscients ?

Covid-19, des étudiants du monde témoignent #13 : Les Pays-Bas confiants mais inconscients ?

Canal au Pays-Bas sur lequel on trouve des bateaux

Les Pays-Bas semblent confiants dans leur gestion de l’épidémie de Covid-19. Le gouvernement dispense des conseils mais n’impose pas de mesures contraignantes, alors que la maladie est considérablement répandue dans le pays des tulipes. Le Pépère News a interviewé Désirée Stockermans, étudiante espagnole à Rotterdam qui se montre assez critique à l’égard de l’action des dirigeants néerlandais. 

Le 22 avril, les Pays-Bas dénombrent 34.134 cas et 3.916 morts. Par rapport à une population de quelques 17 millions d’habitants, le taux de contamination est élevé, il est même supérieur à celui de la France. Jaap van Dissel, le directeur de l’Institut national de la Santé a annoncé un chiffre révélateur. À la suite d’une analyse sur les donneurs de sang, il est apparu que 3% d’entre eux possédaient des anticorps aux coronavirus. Cela signifie que 3% de la population néerlandaise a potentiellement contracté le Covid-19, soit plus de 500.000 personnes. Cette étude mettrait ainsi en lumière une contamination bien plus élevée que ce que les chiffres officiels laissent paraître. La question des tests se pose alors. Les Pays-Bas n’en effectuent pas beaucoup, et seulement sur les personnels soignants et les patients atteints de symptômes graves. Le pays a tout de même augmenté ses capacités en matière de tests.

“Immunité collective” et “intelligence collective”

La stratégie du gouvernement est également remise en question. Le Premier ministre Mark Rutte privilégie “l’immunité collective”. Cela signifie qu’il vise une infection de 50 à 60% des Néerlandais qui développeraient alors des anticorps et qui seraient donc immunisés. Cette théorie est risquée. Les citoyens vulnérables – les personnes âgées, celles souffrant de maladies chroniques ou cardio-vasculaires – peuvent en être les premières victimes. Le gouvernement néerlandais s’attache aussi au principe de “confinement intelligent”. Il compte sur la responsabilité individuelle pour assurer la sécurité collective. Cette idée était initialement défendue par Boris Johnson avant que le Premier ministre britannique ne se résigne à verrouiller son pays. Aux Pays-Bas, les habitants sont donc invités à rester chez eux mais aucune obligation de confinement pour autant. Depuis un mois, seuls les groupes de trois personnes maximum sont autorisés dans la rue. Les grands rassemblements sont interdits jusqu’au 1er juin. Les Néerlandais doivent observer 1,5 mètre de distance de sécurité sanitaire. Cependant, les fêtes familiales peuvent se maintenir si les consignes sont suivies.

Désirée Stockermans, étudiant espagnole en arts et sciences à Rotterdam, est toutefois plus critique à l’égard de l’action gouvernementale. “Les restaurants et les magasins non nécessaires sont fermés jusqu’au 28 avril mais la vente à emporter est quand même autorisée. J’avais un contrat libre dans un restaurant italien. Je suis considérée comme non nécessaire donc je ne travaille pas mais je peux demander une aide financière au gouvernement. Le problème, c’est que beaucoup de gens font cette démarche et donc ça prend du temps ; il faut remplir beaucoup de papiers et ensuite attendre trois semaines pour qu’on traite ton dossier. J’attends la décision, je ne sais pas si je vais recevoir de l’argent. J’espère que oui.”

“Le gouvernement doit prendre plus de responsabilités”

Les Pays-Bas ont ainsi adopté une stratégie opposée à celle de la grande majorité des pays de l’Union européenne. Et cela inquiète Désirée. “Sincèrement, je crois que l’action du gouvernement n’est pas à la hauteur ; il n’est pas assez strict. Il y a beaucoup de gens dans la rue, les parents sortent au parc avec leurs enfants. C’est sympa mais c’est dangereux. Le gouvernement essaye de ne pas tout arrêter pour protéger l’économie mais je pense qu’il doit prendre plus de responsabilités. Il a instauré des mesures mais ne les impose pas assez. Il devrait au moins prévoir des amendes. Il faut être plus strict, confie-t-elle. On peut encore voyager par train et par bus vers les autres pays de l’Union européenne. Par exemple, ça veut dire que je peux retourner en Espagne si je veux. J’ai des amis qui sont repartis en Turquie et au Kazakhstan. Même si c’est seulement un mois de confinement total, ça aiderait. Quand l’épidémie a commencé, le gouvernement n’a pas pris de mesures assez rapidement. Il a été très lent et il doit maintenant être plus ferme.”

Militante écologiste, Désirée souhaite ériger cette crise sanitaire comme un exemple de catastrophe provoquée par l’Homme. “Après cette crise, j’espère que les gens vont réaliser l’importance de l’hygiène et surtout l’impact que le gouvernement a sur leur vie quotidienne. Les Néerlandais ne sont pas très actifs en politique. Je fais partie du groupe Extinction Rebellion. Je crois qu’on doit montrer que le risque de pandémie va être de plus en plus fréquent et qu’il faut changer les mesures prises par rapport à la crise climatique parce que le gouvernement néerlandais ne fait vraiment rien. Il fait semblant d’être écolo. Les gens doivent se rendre compte que la pandémie est en grande partie due à l’inefficacité des politiques publiques en lien avec le climat. Je pense que les gens vont prendre ces questions plus au sérieux. Ils voient en ce moment les conséquences sur leur futur.”

Avec un confinement “responsable” préféré à un verrouillage complet, les Pays-Bas subiront-ils cette épidémie ou s’en sortiront-ils sans trop de dégâts ? Les prochaines semaines s’annoncent décisives. Et la pression des pays voisins pourrait changer la donne.

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