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Covid-19, les étudiants du monde témoignent #11 : En Inde, le confinement exacerbe les inégalités sociales

Covid-19, les étudiants du monde témoignent #11 : En Inde, le confinement exacerbe les inégalités sociales

Drapeau Inde

Avec 1.3 milliard d’habitants, l’Inde est un pays quasiment autant peuplé que la Chine. Ce pays considéré « en développement » se caractérise par de fortes inégalités sociales et des infrastructures pas toujours performantes. Les craintes d’une hécatombe sanitaire sont donc fondées. La pandémie de Covid-19 ne semble toutefois pas encore prendre des proportions dramatiques. Le Pépère News a joint Tanya Saklani, étudiante en agronomie dans le nord du pays.

Lors d’une allocution télévisée le 24 mars, le Premier ministre indien Narendra Modi décrète le verrouillage du pays : « Tout le pays va entrer en confinement. Pour sauver l’Inde, pour sauver chaque citoyen, vous, votre famille ». 1.3 milliard d’habitants se retrouvent ainsi bloqués chez eux du jour au lendemain. Cette période de quarantaine est prolongée jusqu’au 3 mai. Selon leur niveau de contamination, les États ont opté pour un confinement total ou partiel. Actuellement, le pays d’Asie du Sud n’est pas très contaminé avec 437 décès pour quelque 13 000 cas recensés au 17 avril. Il faut néanmoins souligner que les tests ne sont effectués que sur une infime partie de la population. Le gouvernement Modi choisit d’employer la manière forte et prend des mesures drastiques pour empêcher un désastre humain. Tous les services non essentiels sont clos. Seuls les hôpitaux et commerces d’alimentation ou de matériel médical demeurent ouverts.

Des mesures drastiques et soudaines

L’exécutif indien doit pour l’instant aider des centaines de millions de travailleurs précaires et de foyers pauvres. Les 28 et 29 mars, plus de 100 millions de travailleurs journaliers mis au chômage forcé ont tenté de fuir les grandes villes à pied pour rejoindre leurs familles à la campagne. Les autorités ont stoppé l’exode en plaçant tous ces salariés précaires en quarantaine pour deux semaines avant d’éventuellement les laisser partir. En attendant, le gouvernement s’est engagé à les loger et les nourrir. Une aide de 1 000 roupies (11.97 €) par mois pendant trois mois sera versée sur leur compte bancaire. Toutefois, aucune pension n’est prévue pour les travailleurs du secteur informel, qui représentent tout de même 90% des salariés. Le Premier ministre a lancé un fonds de secours, approvisionné par les dons des citoyens. Comme en France, le gouvernement indien demande aux banques et aux propriétaires de repousser les échéances de paiement de prêts, loyers et charges. Narendra Modi et ses ministres ont annoncé un plan d’urgence équivalent à 20 milliards d’euros, dans lequel plus de 800 millions de personnes recevront des aides alimentaires ou financières chaque mois en fonction de leurs besoins. Pour de nombreux habitants, ces promesses paraissent « trop modestes ».

Tanya Saklani est titulaire d’un doctorat en agronomie. Elle étudie actuellement à l’Université d’agriculture et de technologie Govind Ballabh Pant dans la ville de Pantnagar, dans l’État de l’Uttarakhand au nord du pays, une région peu touchée par l’épidémie de Covid-19. « Nous, les étudiants, avons reçu l’ordre de rentrer chez nous le 15 mars. Je suis donc chez moi alors que ma mère et ma sœur sont coincées dans la capitale New Delhi, ce qui est un peu gênant. Mais tant qu’elles sont en sécurité, ça va. »

La solidarité pour contrer les inégalités

La jeune femme salue l’action de l’exécutif : « Le gouvernement a fait un travail louable lorsqu’il s’est agi de prendre des mesures. Modi a essayé de s’attaquer à cette situation de manière très efficace. Je pense que nous faisons de notre mieux et que nous essayons de contrôler cette épidémie aussi durement que possible. » Les directives de distanciation sociale sont selon elle plutôt respectées. « Les policiers travaillent très dur pour que les gens respectent les règles. Ils essaient de sensibiliser la population en chantant ou en jouant dans la rue mais aussi avec des sanctions plus sévères comme des amendes ou des coups de matraque. » Vous avez peut-être vu cette image amusante d’un policier avec un masque en forme de coronavirus sensibilisant les passants aux consignes et gestes barrières.

Tanya souligne aussi la solidarité en place dans son pays. « Modi a également essayé de maintenir le moral des citoyens en leur demandant de soutenir les travailleurs mobilisés en première ligne. C’est très positif de voir les gens faire cela ! Nous avons besoin de sentir que nous sommes dans le même bateau. Le gouvernement appelle tout le monde à l’aide. Tout le monde fait sa part. Notre université fournit des foyers pour les personnes placées en quarantaine. Les distilleries produisent des désinfectants. Les gens donnent de la nourriture, ils essaient de nourrir les animaux errants. Même les plus pauvres aident en cousant des masques faits maison. »

Des inquiétudes autour des capacités hospitalières

La crise sanitaire attise la fracture sociale qui déchire la société indienne. Les plus aisés peuvent se permettre de rester chez eux, à la différence de la foule des plus précaires qui sont privés de leur emploi. Plus de la moitié de la population du pays est considérée comme étant sous le seuil de pauvreté. Les gigantesques bidonvilles (qui abritent 1 habitant sur 2 à Bombay) pourraient se révéler d’immenses foyers de contamination. Aucune mesure concrète n’a été proposée pour protéger leurs habitants. Bien que Tanya semble confiante en l’action de son gouvernement, celui-ci pourrait bientôt révéler ses limites. À cause d’un air extrêmement pollué en permanence dans des villes très densément peuplées, de nombreux Indiens connaissent des difficultés respiratoires et sont donc plus vulnérables au Covid-19. Aussi, les capacités d’accueil des patients dans les hôpitaux sont très faibles, avec un ratio de 0.7 lit pour 1 000 habitants (contre 7 en France). Pour pallier ce manque, des wagons de chemin de fer ont été convertis en salles d’isolement. Ces faiblesses inquiètent le gouvernement qui préfère donc instaurer des mesures strictes et limiter les dégâts.

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