Fermeture des bars à 22 heures : les Lillois manifestent
L’heure était à la colère. Environ 250 personnes se sont réunies, mardi soir, sur la Grand-Place. Elles ont répondu à l’appel de Guillaume Delbarre, le gérant du bar Le Privilège situé dans la rue Royale. Tous se sont déplacés pour manifester leur incompréhension vis-à-vis de la fermeture des bars à 22 heures. Leur mot d’ordre : “Laissez-nous travailler !”.
Ils venaient à peine de fermer leur bars lorsqu’ils se sont rejoints, ce mardi soir, sur la Grand-Place. Des patrons de bar, des salariés et de fidèles clients, venus principalement de Lille mais aussi de Valenciennes et de Douai, étaient présents pour faire part de leur soutien et de leur colère. Même si Valenciennes et Douai ne sont pas encore touchées par cette fermeture des bars à 22 heures, les établissements des deux villes redoutent le même sort. “On sait très bien qu’on va passer derrière eux [les bars Lillois], on a quinze jours d’écart avec eux au niveau des chiffres et derrière c’est nous qui allons suivre” déclare Alexandre Bruhier, patron de l’À Quoi Bar de Valenciennes, avant d’ajouter : “Ce n’est même pas un coup de massue. On est en train de nous assassiner à petit feu.”
“Nous ne sommes pas des assassins”
- Des pancartes coup de poing pour exprimer leur mécontentement. Sur certaines d’entre elles, “Nous ne sommes pas des assassins”, ou encore “Professions stigmatisées” © Alex Beraud
C’est un “ras le bol général de la profession”, comme l’a expliqué Guillaume Delbarre au micro de BFM Grand Lille. Il s’est placé chef de file de cette profession remontée. “Il y a une stigmatisation de nos établissements, de notre profession. Aujourd’hui on en a ras le bol. Aujourd’hui on a envie juste de bosser”, fulmine-t-il.
Les clients eux-même ne comprennent pas pourquoi ce sont les bars qui subissent le plus, alors qu’une très grande majorité d’entre-eux ont respecté les règles. Une cliente, Hélène, affirme que “dans ces bars-là, le port du masque et l’utilisation du gel est obligatoire, les gérants sont très stricts et il n’y a aucune déviation par rapport à cela. […] Je suis énervée pour eux, on ne va pas fermer les bars alors que les gens sont responsables et que les habitués le savent. On enlève une liberté aux gens qui habitent à Lille”.
“Si on n’a plus de bars à Lille, qui est une ville étudiante, ça va devenir une ville morte.” – Hélène, cliente.
“J’aimerais bien qu’on nous entende, qu’on nous consulte et qu’on arrête de prendre des décisions à notre place. J’aimerais qu’on nous accompagne pour trouver des solutions”, annonce Camille Muller, présidente Nord-Pas-de-Calais du Collectif Culture Bar-Bars. Elle aussi redoute le même scénario qu’à Marseille, c’est-à-dire la fermeture totale des bars. Aujourd’hui, Camille estime entre 50 et 60% le pourcentage de fermeture d’établissements du collectif.
Frustrés, tous dénoncent une situation ubuesque et ne conçoivent pas pourquoi les bars ferment alors que les classes, les métros et les supermarchés sont surchargés.
Un avenir incertain pour les bars, mais pas que…
Rémi, 18ans, en alternance en tant que DJ à l’UCPA (école des DJ), est dans le flou : “Je n’ai aucune solution possible, mon contrat a été refusé dû aux nouvelles mesures gouvernementales.” Il ne pourra donc pas mixer à cause de ces fermetures. “Pour le moment, je n’ai aucun avenir dans le milieu du DJing”, déclare Rémi. Il espère la réouverture des bars et des boîtes de nuit très prochainement – pour lui, “le virus ne se propage pas uniquement de 22 heures à 6 heures du matin”.
Le soutien de la Mairie de Lille
Martine Aubry a déclaré vendredi dernier que la fermeture des bars à 22 heures était “une ineptie” et que cela revenait à sanctionner toute une profession. Il faudrait, selon la maire, sanctionner seulement ceux qui ne respectent pas les mesures. Un soutien qui ne fait pas tout pour Alexandre Bruhier : “On ne fait pas de politique politicienne. On n’est pas là pour avoir des soutiens de tel ou tel politiques. On préfère avoir le soutien de la population que le soutien des politiques.” Camille Muller, quant à elle, ajoute qu’“il faudrait que Martine Aubry nous aide avec des indemnisations et qu’on trouve une solution ensemble”.
Après des mois de fermeture, suite au confinement, cette nouvelle restriction met un frein à la reprise d’activité des bars. Environ 10.000 emplois du secteur seraient menacés dans la métropole lilloise. Un avenir difficile à imaginer quand on sait que leur chiffre d’affaire risquerait de diminuer d’environ 70 à 80 %.
Par Alex Beraud