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L’agriculture urbaine gagne du terrain dans la métropole lilloise

L’agriculture urbaine gagne du terrain dans la métropole lilloise

jardin des Saprophytes - agriculture urbaine

Pour répondre aux enjeux environnementaux et à la volonté d’une partie de la population de se reconnecter à la nature, des initiatives autour de l’agriculture urbaine ont éclos dans la métropole lilloise et mobilisent une multitude d’acteurs aux statuts divers. Si la municipalité mène une politique de soutien et s’engage pour son développement, de nombreux champs d’actions sont encore à exploiter pour donner à ce projet de territoire une dimension plus puissante.

Réélue de justesse pour un quatrième mandat au beffroi, Martine Aubry disait avoir “entendu le message sur la nécessité de [la] transition écologique”. Et si l’agriculture urbaine, forte de ses fonctions à la fois environnementales, pédagogiques et sociales répondait, en partie, à cet enjeu contemporain ? On cultivait déjà au cœur des villes il y a des siècles, mais pour des raisons notamment démographiques, l’asphalte a remplacé les parcelles agricoles citadines. Bien plus qu’un simple phénomène de mode, la production de fruits et légumes prend à nouveau racine dans la métropole lilloise, lauréate de l’appel à projet “Quartiers Fertiles”. De l’agriculture hors-sol dans l’hypercentre, en passant par les jardins partagés, les projets de microfermes urbaines et périurbaines, jusqu’au futur centre de recherches sur l’agriculture urbaine au sein du Palais Rameau, la capitale des Flandres favorise l’épanouissement de ces pratiques renouvelées.

À Fives, un jardin “pour et avec” les Lillois

À l’est de Lille, dans le quartier populaire de Fives, un écrin de verdure, mais surtout de transmission et de partage est né en 2015, à l’initiative du collectif les Saprophytes. Le jardin Ressource est “un jardin pour et avec les habitants”, précise Yves-Olivier Evin, salarié de l’association. Passé le portillon apparaissent des espaces potagers, des composteurs, une pépinière en plein développement, et même une forêt-jardin, à petite échelle, qui met en pratique “l’idée d’un système végétal qui mène à l’autonomie”. Ce sont autant d’initiatives qui fonctionnent grâce au travail commun des habitants-jardiniers car, selon Yves-Olivier, cette agriculture urbaine retisse “le lien à la nature” mais aussi “le lien entre les hommes“. Étudiants, parents et enfants, retraités et bien d’autres Lillois curieux et motivés sont venus comprendre, apprendre et “voir comment ça marche”. Yves-Olivier est là chaque mercredi après-midi, pour “guider et être à l’écoute des personnes qui arrivent” ; ils construisent ensemble le jardin. Plus que la production ou la consommation, c’est beaucoup de pédagogie qui anime le lieu. Ici, l’agriculture urbaine a un rôle concret : “C’est voir qu’entre tes mains, ça marche. C’est partager tant le savoir que l’agricole.”

jardin ressource fives potager
Au cœur du jardin Ressource à Fives. © Olga Poyet/Pépère News

Impulsée d’abord par les citoyens eux-mêmes – comme c’est le cas au jardin des Saprophytes – l’agriculture urbaine se développe et la ville de Lille entend bien accompagner davantage cette dynamique. Comme l’a indiqué Martine Aubry, l’agriculture urbaine est “un outil important dans [les] projets de renouvellement urbain.” Pour accompagner la métamorphose paysagère engagée depuis quelques années, la municipalité compte, en ce début de mandat, sur le réaménagement du palais Rameau par Junia, l’association des écoles d’ingénieurs de la Catho.

Pédagogie et recherches autour des agricultures urbaines

Occupé depuis plus d’un siècle par la société d’horticulture, le palais Rameau, édifice classé Monument historique, deviendra – après les travaux qui commenceront en septembre et devraient se terminer en 2023 – un démonstrateur d’agricultures et d’alimentation de demain. La Ville a, dans ce sens, signé un bail de 25 ans avec Junia. Cette association d’écoles entend “allier tiers-lieu ouvert au public et un espace démonstrateur pour les étudiants, enseignants-chercheurs et entreprises”, affirme Marie Stankowiak, pilote du démonstrateur. L’objectif, poursuit-elle, est ainsi de réunir “dans un même lieu des gens qui n’y connaissent pas grand-chose ainsi que des enseignants-chercheurs”. Même si elle reconnaît que “l’agriculture urbaine ne nourrira jamais l’ensemble de la Métropole européenne de Lille, cet espace permettra de se réapproprier dans une certaine mesure les enjeux alimentaires et agricoles. Comme au jardin Ressource des Saprophytes, la principale volonté est donc de permettre aux gens de se reconnecter à la terre mais aussi entre eux.

Outre le palais Rameau, plusieurs autres projets permettant de “poursuivre l’engagement pionnier pour le retour de l’agriculture en ville” figuraient aussi dans le programme de l’actuelle majorité municipale. Parmi ceux-ci, le réaménagement du secteur Concorde (boulevard de Metz) ou encore la mise en place d’une serre verticale à Fives Cail, avec l’ISA, dans le cadre de la Halle gourmande. Pourtant, l’opposition, notamment les Verts, souhaiterait que cela aille plus loin. Stéphane Baly, chef de file de l’opposition et élu à la MEL, semble se féliciter des quelques initiatives de la ville mais regrette que celles-ci soient isolées et ne s’inscrivent pas dans un projet d’ensemble. Pour lui, l’agriculture urbaine, telle qu’elle se développe actuellement dans la métropole, “permet de sensibiliser à la saisonnalité, aux légumes de saison, de faire de l’éducation populaire […] tout en tissant du lien social”. Mais l’échelle semble relativement trop réduite.

“Il faut installer, dans la métropole lilloise, des activités agricoles correspondant aux besoins.” – Stéphane Baly, conseiller municipal et métropolitain écologiste

Alors, comment développer l’agriculture urbaine dans les prochaines années ? L’élu écologiste insiste tout d’abord sur la nécessité de “fabriquer une ceinture maraîchère pour de l’approvisionnement frais”. Faire rentrer dans le débat l’idée d’une “ville nourricière” est aussi un enjeu pour les Verts. Stéphane Baly propose à cet égard de “planter de préférence des arbres fruitiers dans l’espace public”. En somme, “il faut installer, dans la métropole lilloise, des activités agricoles correspondant aux besoins”.

Afin de rendre la ville et la métropole plus vertes, une évolution des modes de consommation sera également de mise. Les Lillois seront-ils prêts à enclencher cette transition ? Une chose est sûre, les initiatives fleurissent. Reste à voir si, dans les prochaines décennies, les politiques publiques placeront l’agriculture urbaine au centre de la transition écologique.

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