Le masque de protection, nouvel accessoire tendance ?
La pandémie de Covid-19 a poussé la population à adapter son mode de vie et ses habitudes. Parmi ces dernières, le port du masque tend peu à peu à se généraliser à tous les secteurs et envahit l’espace public… Au point d’être réapproprié par le monde de la mode.
Depuis le début de la crise sanitaire, de nombreuses entreprises textiles françaises ont participé à « l’effort de guerre » en produisant des masques en tissus lavables et réutilisables. À Lille, le collectif Des Masques en Nord, développé par le CHU de Lille, a lancé la production des masques Garridou avec le soutien du fabricant textile Lemahieu. Partout ailleurs, en France et dans le monde, les grands noms de la mode (Nike, Lacoste, Balenciaga…) se sont aussi engagés à produire des masques pour les soignants et les professionnels.
Mais depuis quelques jours, de nouvelles publicités font leur apparition, notamment sur les réseaux sociaux. Celles-ci font la promotion de « masques de protection » stylisés voire même personnalisables, à base de motifs floraux et d’imprimés mignons, destinés non pas aux soignants ou aux professionnels mais aux particuliers.
Une véritable opportunité pour les créateurs
Alors que le port du masque prend progressivement de l’importance dans les discours politiques (il est par exemple devenu obligatoire dans les transports en commun depuis le 11 mai), de plus en plus de particuliers cherchent à s’en procurer – ou, par défaut, à s’en fabriquer soi-même. Le monde de la mode y verrait-il une aubaine ? En effet, quel meilleur moyen pour une marque pour se faire connaître que d’être portée à même le visage…
De multiples marques de créateurs ont donc lancé leur gamme de masques « tendance », comme le chapelier de luxe Benoît Missolin ou encore l’entreprise de fabrication de capes et blouses de barbiers La Blouse Française, qui alimente depuis un mois son compte Instagram de ses tout nouveaux masques personnalisables. Ou comment relancer l’activité de son commerce après deux mois de creux économique.
Les grandes marques ont aussi sauté sur l’occasion. Ainsi, Disney (avec ses masques pour enfant à l’effigie des héros de dessins animés), Supreme ou encore Off-White ont récemment mis en vente de nouvelles pièces ornées de leur logo. Le rapport de Lyst – moteur de recherche spécialisé dans la mode – sur l’évolution de la demande dans le monde de la mode indique que les recherches web de masques faciaux ont augmenté de 496% depuis le début de l’année. La pièce la plus convoitée parmi elles : la gamme de masques de la marque Off-White, vendus à 87€ l’unité, actuellement en rupture de stock.
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La mode oui, mais pas à n’importe quel prix
Le masque de protection est donc en voie de devenir trendy. Néanmoins, avant de craquer – et de dépenser – pour ce joli imprimé cactus ou le logo stylé de votre marque préférée, il ne faut pas oublier le plus important : ce masque de protection protège-t-il vraiment ?
En effet, il ne suffit pas que la composition du tissu du masque porte le label OEKO-TEX, comme le mettent en avant certaines marques. L’Association française de normalisation (Afnor), dont le rôle est de définir et d’homologuer les normes françaises sur les produits, a développé une norme de fabrication des « masques barrières », la norme NF EN-14683. Même si la DGE (Direction Générale des Entreprises) indique que le respect de cette norme « n’est pas obligatoire mais est un moyen privilégié pour produire des masques conformes au cadre » de fabrication des masques établi par le gouvernement, c’est un moyen sûr de s’assurer de la conformité du produit.
Par ailleurs, l’Afnor a lancé sa plateforme qui recense par département les entreprises certifiées et met à disposition des industriels les ressources nécessaires pour être aux normes (dont le document Afnor Spec, qui présente dans les détails le processus de fabrication à adopter).
Que penser de ce nouveau mouvement de mode ?
On peut se demander quels effets pourrait avoir un tel engouement autour de ce nouvel accessoire fashion. Du point de vue écologique, la mode du masque en tissu lavable et réutilisable serait un moyen de lutter contre la pollution produite par la consommation de masques à usage unique (que l’on commence à retrouver sur le sol des rues dans les grandes villes), à condition que leur fabrication soit locale et éco-friendly. Du point de vue sociétal, la création d’un tel besoin pourrait inciter la population, parfois encore réticente, à porter un masque dans les lieux publics.
D’un autre côté, si les grandes marques commencent à s’impliquer dans ce nouveau secteur de la mode en apposant leur logo sur des masques, les inégalités économiques s’en verront renforcées. On assiste à un nouvel essor de la société de consommation. Le fameux « monde d’après », fantasmé par certains, risque bien de rester une utopie.