PORTRAITS. Les pompiers du Nord en lutte
PORTRAITS. Les pompiers du Nord en lutte
Théo Vanneste, 30 ans, pompier depuis 3 ans
Je suis à la caserne depuis 2017, et syndiqué depuis 2 ans. J'ai participé à plusieurs manifestations, on est même allés deux fois à Paris. Sans la mobilisation, on est rien. Tout combat syndical est gagné grâce à l'investissement de chacun.
"Il faut pas oublier que notre ligne de base c'est pas forcément l'argent mais c'est les effectifs, il faut qu'on parte en sécurité. Surtout avec toutes les incivilités, il y en a de plus en plus. Je préfère partir dans un engin complet que de partir à moins, et qu'en plus on se fasse agresser sur les lieux. Il faut toujours y croire, c'est l'ensemble des agents qui peut faire changer les choses. À Tourcoing, la dernière fois, on était 600 et ça a joué dans les négociations. "Source: © Célia Consolini / Pépère News
PORTRAITS. Les pompiers du Nord en lutte
Jonathan Delchambre, 38 ans, pompier depuis 14 ans
Je suis arrivé dans la caserne en 2004 en tant que pompier professionnel. Et je suis syndiqué depuis 2005. J'ai vu l'évolution : en 2004 quand je suis arrivé, on était 30 de garde. Et là en 2020, on devrait être 24, mais en réel on est à 20 ou 21. J'ai vu tout le monde partir mais pas beaucoup de monde arriver.
"Avec le Covid, on est tellement gavés de cette situation : on a pas de thermomètre, pas de quoi se désinfecter les mains, on a pas tout ça. Dans la caserne on a des idées, moi j'ai des idées : on a trois ambulances, pourquoi pas mettre une ambulance "Covid" qui ne fait que ça ? Mais comme il manque de l'effectif, on ne peut pas. Donc là c'est tous nos camions qui sont dans le Covid. Moi, j'ai été contaminé, je l'ai eu en février."Source: © Célia Consolini / Pépère News
PORTRAITS. Les pompiers du Nord en lutte
Bruno Cappoen, 54 ans, pompier depuis 36 ans
J’ai commencé à [la caserne de] Littré. Après j’ai fait plusieurs casernes, je suis passé par Roubaix, Valenciennes, et d’autres, et je suis revenu à Littré. Je suis bien à Littré. À chaque fois que je suis parti, je suis revenu à Littré.
"Je suis syndiqué depuis tout jeune, depuis que je suis pompier. C'est une culture dans le Nord, d'être syndiqué. Il y a toujours eu des batailles, des luttes pour en arriver là, avec les cheminots... Se syndiquer c'est logique pour nous. Comme pour tout, ce qui m'a conduit à me syndiquer c'est la défense d'un vrai service public."Source: © Célia Consolini / Pépère News
Depuis un an et demi, les sapeurs-pompiers professionnels du SDIS (Service départemental d’Incendie et de Secours) du Nord bataillent pour faire entendre leurs revendications. Un engagement qui n’a été que renforcé depuis la crise de la Covid.
La prime de feu, “c’est ça le vrai combat aujourd’hui”, assure Bruno Cappoen, représentant syndical Force Ouvrière de la caserne de Littré, à Lille. Pour Théo Vanneste, représentant syndical CGT à la caserne de Roubaix, “les effectifs, c’est la priorité”. Dans ces deux centres de secours, tous les pompiers professionnels sont mobilisés autour de deux revendications principales : une revalorisation des primes et davantage d’effectifs. Une lutte avec l’État et la présidence du SDIS qui dure depuis début 2019.
De fausses promesses qui laissent un goût amer
La prime de feu, adoptée en 1984, est une prime liée aux risques du métier. Elle devait augmenter progressivement jusqu’à atteindre 28% du salaire en 2004, ce qui est le cas aujourd’hui dans la plupart des départements français. Or, dans le Nord, qui possède une des plus importantes SDIS du territoire, “ça s’est arrêté à 19%”. La raison avancée par la présidence de la SDIS : il n’y a “pas le budget” à cause de charges patronales trop élevées, explique Bruno. Même excuse pour la fameuse prime Covid : “La prime Covid […] on nous la reconnaît pas, sous excuse qu’on a fait 30% d’interventions en moins pendant le confinement.” Injustifié pour Bruno, qui affirme que la prime n’est pas définie par les heures travaillées mais par le degré d’exposition au virus – auquel les pompiers n’ont pas échappé.
“On ne comprend pas pourquoi on ne mérite pas cette prime” – Théo Vanneste, représentant syndical CGT à la caserne de Roubaix
La SDIS du Nord devrait compter 1.718 pompiers professionnels en caserne. C’est le règlement opérationnel qui distribue les effectifs entre les casernes du département, en se basant sur une analyse des risques spécifiques aux territoires. Ainsi, les engins spécialement adaptés aux risques locaux sont affectés aux centres de secours. C’est ensuite ces engins qui définissent l’effectif au sein d’une caserne – en théorie. “Un fourgon qui va au feu, c’est six personnes. Une échelle, c’est deux. Une ambulance, c’est trois. Ici, ils ont décidé qu’il faudrait un engin feu, une échelle et deux ambulances qui puissent partir simultanément.” À la caserne de Littré, conformément au règlement, il devrait donc y avoir plus de quinze pompiers présents en permanence. Or, aujourd’hui, ils sont treize. Demain, ils arriveront peut-être à être quatorze. Même problème à Roubaix : ils sont un peu plus de 90 pompiers dans la caserne, au lieu des 108 nécessaires à son bon fonctionnement.
La parole des pompiers
Les 22 et 23 octobre au matin, nous nous sommes rendues dans les casernes de Littré et de Roubaix pour rencontrer ces pompiers qui s’accrochent à leurs revendications depuis un an et demi. Cliquez sur leur portrait pour accéder à leurs témoignages.