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Lille, une ville engagée contre les violences faites aux femmes

Lille, une ville engagée contre les violences faites aux femmes

Courses, rassemblements, illumination de bâtiments en orange, affiches et collages… De nombreux dispositifs ont été mis en place par la mairie de Lille du 8 novembre au 10 décembre, afin de sensibiliser aux violences subies par les femmes. Retour sur ces évènements qui se sont déroulés autour de la Journée Internationale de lutte contre les violences faites aux femmes le 25 novembre.

Depuis 1999, le 25 novembre est la Journée Internationale de lutte contre les violences faites aux femmes. Chaque année, la ville de Lille se mobilise autour de cet enjeu. Parmi les nouveaux dispositifs développés par la mairie, on compte des affiches de sensibilisation exposées partout dans la ville. C’est donc à côté d’une des affiches noir et blanc, où le message “NON, elle ne l’a pas bien cherché” est inscrit, que nous sommes allés demander leur avis aux Lilloises et Lillois.

©Lille Addict
L’affiche de sensibilisation développée par la ville de Lille. © Lille Addict

“C’est un bon début.” Voilà ce qui est principalement ressorti après avoir interrogé les Lillois. Sans surprise, toutes les personnes interrogées ont félicité les différents dispositifs mis en place par la ville. “Toutes les villes ne font pas cela, ça prouve que ce sujet leur importe“, nous dit Manon, 25 ans. May, une étudiante de 22 ans, est du même avis : “C’est une bonne décision, car toutes les villes de France ne mettent pas ce genre d’affichage.” Tout ce que la ville a fait ne laisse donc pas les Lilloises et les Lillois insensibles. Cependant, certains apportent de la nuance et restent plus pragmatiques. Certes, c’est un bon début, mais “cela n’est pas encore assez“, nous confie Ingrid, 39 ans. Quant à lui, Nicolas, 24 ans, pense que “c’est bien, même si malheureusement ce n’est pas en collant des affiches que le comportement de certains hommes va changer“.

Une communication qui peut laisser à désirer

À chaque Lillois interrogé, il a été nécessaire d’expliquer les différents dispositifs organisés, ainsi que le message passé par l’affiche. En effet, nombre d’entre eux n’étaient pas renseignés sur la mobilisation élaborée par la ville de Lille comme l’illumination en orange de plusieurs bâtiments, couleur symbolisant la lutte pour un avenir sans violence à l’encontre des femmes. C’est le cas de Léa, étudiante de 21 ans, qui indique : “J’avais vu les bâtiments illuminés, mais je ne savais pas que c’était pour cela.

Le Palais des Beaux-Arts éclairé en orange © Hugo Saez
Le Palais des Beaux-Arts éclairé en orange. © Hugo Saez

Je n’en avais pas entendu parler, et c’est la première fois que je remarque l’affiche“, nous partage Cyril, lycéen de 17 ans. Ce constat remet en question l’efficacité de la communication de la mairie. L’information avait été principalement partagée par la presse locale, ainsi que sur les réseaux sociaux de la ville. Concernant la communication établie par les affichages, les interrogés restent sceptiques. Selon Laurent, Lillois de 57 ans : “Pas mal de gens comme moi doivent passer devant sans la remarquer.” “On pourrait prendre cela pour une affiche publicitaire“, commente Léa, lycéenne de 17 ans. De fait, aucune des personnes que nous avons interrogées n’avait déjà remarqué la présence de ces affiches, pourtant déjà présentes depuis plus de deux semaines. Positionnement mal choisi, couleur trop sombre, ou bien écriture trop petite, plusieurs arguments sont utilisés par les passants pour justifier leur critique.

Un projet artistique au service de la lutte contre le harcèlement de rue

La Dame qui colle est une street artist qui a débuté les collages en juin 2021. Très engagée dans la lutte pour les droits des femmes, elle a réalisé neuf collages de portraits de femmes disséminés partout dans la ville de Lille : la station de métro de Porte de Douai, l’Aéronef, la Maison de quartier de Moulins ou encore la médiathèque de Saint-Maurice. Après avoir proposé son projet intitulé “Gardiennes de rues” à la municipalité, l’artiste a “décidé des lieux et des quartiers” de ses collages. Les modèles sont des lilloises et deux d’entre elles sont des femmes rencontrées dans des associations de la ville. La Dame qui colle les a d’abord photographiées en leur laissant le choix de leurs vêtements et de leur pose, il lui faut ensuite entre “15 et 20 heures pour réaliser le portrait”.

Un collage de gardienne de rue réalisé par La Dame qui colle © Maxine Marchand
Un collage de gardienne de rue réalisé par La Dame qui colle. © Maxine Marchand / Pépère News

Poignantes, impactantes ou encore saisissantes, les adjectifs ne manquent pas face au regard perçant de ces femmes. L’artiste explique : “J’avais envie de montrer des femmes qui n’avaient pas de sexualisation dans leur manière d’être, plutôt assez authentiques et de pouvoir essayer de changer l’image véhiculée par la société.” Le message a pu être perçu différemment par les passants qui ont vu dans ces œuvres “des femmes qui disaientje te vois’ alors que dans [l’idée de l’artiste] c’était plutôt un message de protection qui était envoyé“.

J’avais envie de montrer une image non sexualisée des femmes dans l’espace public pour aller à l’encontre de la représentation de la féminité véhiculée par la société – La Dame qui colle

La Dame qui colle tire des conclusions positives de ce projet car “l’espace de la rue ça apporte des décors différents de l’atelier“. Dans ses projets futurs, elle aimerait aborder les violences ordinaires “notamment les accidents de la route à vélo”.

Une course pour dénoncer les violences faites aux femmes

Il n’est pas rare de voir des événements sportifs qui soutiennent une cause quelconque mais il est beaucoup moins banal de rencontrer une course alliant le sport et le soutien aux femmes victimes de violences. C’est pourtant le cas du challenge 3919 organisé le vendredi 26 novembre dernier à la citadelle de Lille, dans le cadre de la Journée Internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes. Les organisateurs Lille Métropole Athlétisme, Osez le féminisme 59 et la Ville de Lille ont proposé trois parcours aux participants : 5 km course, 5 km marche et 10 km course.

Les participants s'échauffent au départ de la course © Maxine Marchand
Les participants s’échauffent au départ de la course. © Maxine Marchand / Pépère News

Pour cette troisième édition, l’événement a encore une fois séduit puisqu’ils étaient nombreux cette année : plus de 3.000 participants composés à 70 % de femmes et 30 % d’hommes, formant un public très large et de tout âge. C’était par exemple une première pour Chloé et Anna qui ont considéré la cause “importante” et voulaient dans un même temps “se remettre au sport“. La course était ouverte à tous ceux et toutes celles qui souhaitaient soutenir la cause, comme Tristan : “Je participe pour le côté sportif, mais avant tout pour soutenir la cause défendue par la course.” C’est sous une pluie battante que les participants se sont élancés, mais cela ne les a pas découragés, Théo témoigne : “Même sous la pluie, on est équipé, et l’ambiance reste la même.

L’objectif principal était donc de faire parler de la cause, ainsi que du numéro d’appel 3919. Ce numéro gratuit et anonyme, fonctionne 24h/24 et 7j/7 dans le but d’écouter les victimes de violences conjugales, sexistes et sexuelles. De même, cela a permis de récolter des dons pour les reverser à des associations qui viennent en aide aux femmes victimes de violences, comme l’association SOLFA (Solidarité Femmes Accueil).

Un bilan prometteur pour l’association Osez le Féminisme

Osez le Féminisme 59 est une antenne locale de l’association Osez le Féminisme. Cette dernière est créée en 2009 dans le but de défendre les droits des femmes face à la réforme Bachelot qui prévoyait des réductions de financement pour le planning familial. Claire, bénévole à Osez le Féminisme 59 explique que leur “arme au niveau local, c’est l’éducation populaire, c’est-à-dire faire connaître ces sujets, discuter et apporter une touche de féminisme dans la société d’aujourd’hui“. À travers des réunions publiques sous forme de conférences-débats et ouvertes à toutes et tous, l’association tente d’apporter de l’information aux participants. “On fait aussi des interventions en milieu scolaire et on est présents sur les manifestations, ajoute Claire.

Les membres de l’association sont porteuses de projets comme celui du challenge 3919, né en 2019 grâce à une bénévole professeure d’EPS qui a suggéré l’idée d’une course solidaire. “Après des discussions avec la mairie et le LMA [Lille Métropole Athlétisme, ndlr] qui voulait aussi organiser un tel évènement, le challenge 3919 a été créé, commente Claire. En 2020, l’édition s’est déroulée à distance en raison des restrictions sanitaires. Cette année, l’association a décidé de proposer les deux formats, présentiel et distanciel. À l’évocation d’une possible quatrième édition, Claire répond avec enthousiasme que toute l’équipe de l’organisation “a vraiment envie que ça continue“.

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