Notre-Dame couverte d’or, la conscience s’endort
Toute la France s’est accordée dans une seule et même douleur lundi dernier : celle de la perte d’une partie importante de son patrimoine. Notre-Dame a brûlé plus fort que le bûcher d’Esméralda et sa flèche si fière s’est planté dans notre cœur. Pourtant, la belle Dame ne manque pas de soutien puisque des millions ont déjà été versés à sa cause par de “généreux donateurs”. Notre-Dame rafle donc la mise pendant que tous les autres restent dans la mouise !
Une générosité très défiscalisée
Vous aussi vous n’en croyez pas vos yeux quand votre voisin de caisse sort un billet de 200 € au supermarché ? Votre cœur rate un battement et votre cerveau se dit “Comment ? “. Et bien c’est l’effet que ça m’a fait quand j’ai entendu que certaines entreprises et familles aisées avaient donné des millions à la cathédrale du jour au lendemain. Dans un premier temps j’ai trouvé ça extrêmement louable. Puis après réflexion, je me suis dit que cela mettait encore plus en lumière les inégalités économiques de notre société. Quand Bouygues offre 10 millions d’euros, que François-Henri Pinault se déleste de 100 millions et que la famille Bettencourt- Meyers (actionnaire de l’Oréal) et Bernard Arnault injectent 200 millions comme ça, d’un claquement de carte bancaire, le reste du monde galère pour s’acheter une PastaBox.
C’est ainsi que la cagnotte de Notre-Dame à atteint les 800 millions d’euros en seulement 2 jours. Cependant cet élan de générosité est à prendre avec des pincettes. En effet toutes ces sommes seront défiscalisées, c’est à dire qu’une partie sera déduite des impôt à payer. Par exemple pour les entreprises les réductions montent à 60 % de leurs dépenses en faveur du mécénat. Un don de 100 millions d’euros ne coûtera en réalité que 40 millions d’euros. Pour les particuliers, cette déduction sera de 75 % jusqu’à 1 000 euros, puis 66 % pour les dons plus importants. D’autant plus que ces dons peuvent sonner comme un bon coup de pub pour les entreprises qui veulent ainsi se faire bien voir et faire de la préservation de notre patrimoine une grande opération de communication.
Les répercussions, les critiques
Tout n’est pas tout noir, parmi les donateurs certains disent vouloir renoncer à l’avantage fiscal comme la famille Pinault qui “considère en effet qu’il n’est pas question d’en faire porter la charge aux contribuables français”. Car, oui, toutes ces réductions fiscales se feront au détriment du contribuable. Avec ces remises l’État, et donc chacun d’entre nous, va aussi payer… C’est ce que rapporte dans Le Monde, Gilles Carrez, député Les Républicains (LR) du Val-de-Marne et rapporteur spécial du programme patrimoine pour la commission des finances de l’Assemblée nationale.
Beaucoup de monde y trouve donc son mot a redire et les critiques fusent. Pour Philippe Poutou si ces grosses fortunes “ont trop d’argent, qu’ils le mettent à disposition de la collectivité, il y a bien des urgences sociales. Ou qu’ils se laissent réquisitionner”. Pour l’ancienne gilet jaune Ingrid Levavasseur, il faut «revenir à la réalité» et voir «la misère sociale». Olivier Faure, patron du parti socialiste dit sur Twitter : «Formidable mobilisation pour Notre-Dame. Mais il faut une mobilisation supérieure pour ces familles qui ont du mal à finir leurs mois, qui forment une cathédrale humaine et pour protéger notre environnement qui est notre patrimoine que nous savons en péril».
Le principal reproche se fait donc au niveau des priorités qui semblent à revoir. Pour Stéphane Bern, « opposer les vieilles pierres aux hommes » est « ridicule car les travaux de restauration du patrimoine nourrissent les hommes. Cela donne de l’emploi ! ». Alors, oui peut-être Stéphane mais en attendant on a beau dire que le patrimoine c’est de l’histoire et que c’est quelque chose de non quantifiable, derrière il y a tout de même des humains à loger, aider et soigner.
Des dons qui nourrissent l’espoir, pas le peuple
Ce sont ces mêmes reproches qui sont réitérées par les associations comme la fondation Abbé Pierre qui a justement appelé sur Twitter ces grandes fortunes à « ne pas oublier les plus démunis ». L’importance des dons faits à Notre-Dame est incomparable face au montant des dons récoltés en France, toutes causes confondues, qui atteignait 7,5 milliards d’euros en 2018. En quelques jours on aura atteint pour un joli tas de cailloux décoré de gargouille l’équivalent d’un septième de la totalité des dons octroyés à des humains malades ou en difficultés, à des enfants et animaux maltraités ou encore aux urgences humanitaires.
C’est sur cette pensée et les mots bien tournés de l’essayiste Ollivier Pourriole que je vais vous laisser méditer.
« Victor Hugo remercie tous les généreux donateurs prêts à sauver Notre-Dame de Paris et leur propose de faire la même chose avec Les Misérables »
Sur le fond, je suis totalement d’accord. Dans le sens ou plus d’aide ne ferait pas de mal. Seulement, le mécénat est une part de risque pour une entreprise. C’est simple: il existe énormément d’organismes comme la croix rouge, médecins sans frontières ou encore la fondation abbé Pierre (j’en passe bon nombre). Aider, oui, mais aider tout le monde cela devient compliqué pour ces entp dans la durée, sur tout le spectre… Et l’on s’ofusquerait alors: “pourquoi eux ils aident telle organisation et pas l’autre ? C’est de la discrimination !” L’interprétation de ces aides deviendrait politique… D’où le “risque”. Pourquoi ne pas sollicitées dernières pour une cagnotte chaque année dont les dons seraient partagés équitablement entre toutes les organisations? (Avec défiscalisation) Qu’elles soient patrimoniales ou humanitaire ?… Vaste sujet ! Et bien bel article (même s’il est un peu trop subjectif sur les bords…)