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“Nous les Hauts-de-France” : Une gauche unie à la conquête du Nord ?

“Nous les Hauts-de-France” : Une gauche unie à la conquête du Nord ?

Siège du conseil régional à Lille (21/09/20)

Mené par des figures politiques locales, le mouvement “Nous les Hauts-de-France” lance un appel d’union à la gauche. En ligne de mire, les élections régionales 2021, aux airs de revanche, présentent de gros enjeux.

Pour peser aux élections régionales du printemps 2021, la gauche nordiste devra s’unir. C’est en tout cas l’idée du mouvement citoyen “Nous les Hauts-de-France”, qui s’est fait connaître dans une tribune éponyme publiée le 9 septembre 2020 dans Libération. Ils étaient 38 signataires à cette date, mais la liste s’est largement étoffée depuis. Parmi eux, on retrouve des citoyens engagés dans diverses associations, des avocats et des élus à différentes échelles. Tous les grands partis politiques de gauche et écologistes y sont représentés ; du PS à EELV en passant par Génération.s, le PCF et LFI. Tout ce beau monde se réunit déjà pour lancer un appel rassembleur à la gauche en vue des élections régionales qui se tiendront en mars 2021.

"Les gauches […] lancent un appel pour créer les conditions d'un rassemblement afin d'éviter une division lors des…

Publiée par Nous les Hauts-de-France sur Jeudi 10 septembre 2020

L’élection régionale 2015, l’origine d’une frustration

Si les diverses gauches locales tiennent tant à s’unir, c’est qu’elles ont effectivement raté le coche lors des dernières élections. Erreur ayant eu de lourdes conséquences. Au premier tour des élections régionales 2015, quatre partis de gauche s’étaient portés candidats. Le moins que l’on puisse dire, c’est que cette dispersion ne leur avait pas réussi. Que ce soit le Parti communiste, EELV, ou Lutte ouvrière, aucun n’avait obtenu les 10% synonymes de qualification au second tour. Et si le PS y avait accédé avec 18%, c’était loin derrière les 25% des Républicains et surtout les 40% du Front national.

Pire, les socialistes avaient même retiré leur candidature pour faire barrage au Front National. Ainsi, les Républicains de Xavier Bertrand avaient pu l’emporter face à l’extrême droite de Marine Le Pen. Mais le sacrifice de la gauche l’avait privée du moindre siège au conseil régional, ces derniers étant répartis à la proportionnelle selon les résultats du second tour. Autant dire que voir la droite administrer la région depuis six ans, avec pour seule opposition le RN, est un véritable crève-cœur pour la gauche.

Xavier Bertrand en 2014, un an avant de l'emporter aux élections régionales des Hauts-de-France. © <a href="https://creativecommons.org/licenses/by/2.0/deed.en">European People's Party</a>
Xavier Bertrand en 2014, un an avant de l’emporter aux élections régionales des Hauts-de-France. © European People’s Party (Wikimedia Commons)

De nombreuses critiques, mais aussi des idées

Comme on pouvait s’y attendre, “Nous les Hauts-de-France” exprime dans sa tribune son mécontentement envers la politique menée par Xavier Bertrand, président du conseil régional. Le mouvement juge que la région est devenue moins attractive, en témoigne la baisse démographique récente (sortie du top 3 des régions les plus peuplées). Il déplore aussi l’absence de politiques de santé, constatant que les Hauts-de-France possèdent la pire espérance de vie de France métropolitaine – affirmation vérifiable avec les derniers chiffres de l’Insee.

“Nous les Hauts-de-France” se montre encore plus critique à l’égard de Proch’emploi, qualifié d’“avatar de Pôle emploi” en moins efficace. Ce dispositif mis en place par la région vise à faire le lien entre les demandeurs d’emplois et les employeurs souhaitant recruter. Sauf que la tribune dénonce un manque d’accompagnement du système et des retours à l’emploi temporaires. Le mouvement propose alors une alternative avec “un outil bancaire public régional finançant des projets utiles créateurs d’emplois, à partir de critères écologiques et sociaux forts”.

Dernière revendication, et pas des moindres : une écologie sociale exigeante et populaire. “Nous les Hauts-de-France” veut renforcer les transports en commun, assurer une alimentation saine, accompagner la bascule d’une région sans carbone, assurer la rénovation thermique des logements, ou développer le transport fluvial et le ferroutage… À propos du télétravail, d’actualité avec la crise de la Covid, le mouvement prône la création d’espaces de travail partagés à proximité du domicile.

Tout cela ne constitue pas encore un programme mais montre bien qu’ils “souhaitent ouvrir une nouvelle ère pour leur région”. Ce pour quoi il faut logiquement prendre la tête du conseil régional, remise en jeu au printemps prochain.

L’union, un idéal inatteignable ?

Alors pour ne pas rééditer l’échec des dernières élections, la gauche se met en ordre de bataille. Cette fois, elle veut faire barrage au Rassemblement national elle-même, comme évoqué dans la tribune de “Nous les Hauts-de-France”. D’autant que les municipales ont prouvé l’efficacité de la formule, avec les victoires de “Bordeaux respire” ou du “Printemps Marseillais”. Et pourquoi pas dans le Nord ?

Sauf que si l’on reprend l’exemple des municipales, la gauche lilloise ne s’est pas accordée comme dans les villes précédemment citées. Au contraire, la socialiste Martine Aubry et l’écologiste Stéphane Baly ont chacun mené une campagne municipale âpre l’un vis-à-vis de l’autre. Cette opposition est loin d’être terminée, à l’image des débats récents à propos du projet d’aménagement de la rue Solférino.

La gauche locale ne s’entend pas toujours, à l’image de la relation conflictuelle entre Stéphane Baly et Martine Aubry. © Quentin Saison / Collectif Gerda

Et puis, une liste commune est synonyme d’une seule tête de liste. L’écologiste Damien Carême a déjà fait part de son souhait de prendre ce rôle. Mais le secrétaire général du PCF Fabien Roussel s’est également dit “disponible” pour mener une union de la gauche. Des prétendants pourraient aussi venir d’autres partis, comme Adrien Quatennens ou Ugo Bernalicis dont les noms circulent à LFI. La concurrence devrait forcément amener des désaccords.

Malgré tout, l’enjeu pourrait bien permettre un “dépassement de la rivalité des personnes”. Par exemple, le socialiste nordiste Patrick Kanner était d’abord opposé à la stratégie de “rassemblement à tout prix” de son premier secrétaire Olivier Faure. Il est désormais signataire de la tribune “Nous les Hauts-de-France” et plaide pour “faire cause commune” lors les prochaines élections. En tout cas, une chose est sûre, la gauche a lancé la course aux régionales dans le Nord.

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