Perche en Or 2023 : des favoris solides et des français prometteurs

Ce samedi 29 janvier, les perchistes internationaux étaient au rendez-vous pour la troisième édition de la Perche en Or. Ernest Obiena et Tina Sutej se sont imposés à l’occasion de cette deuxième étape du Perche Elite Tour.

La fête du saut à la perche dans le Nord a eu lieu cette année au vélodrome de Roubaix. Habituellement, le Perche en Or se déroule à la salle Léo-Lagrange de Tourcoing mais pour cause de travaux, l’épreuve a dû se délocaliser. Qu’importe, la deuxième étape du Perche Elite Tour s’est bien disputée, après Bordeaux la semaine passée. L’étape nordiste est devenue une (bonne) habitude et le public de connaisseurs a pu profiter de performances de choix mais aussi d’athlètes qui poursuivent leur montée en puissance.

Obiena assure, les Français en demi-teinte

Après une barre réussie à 5,75m, plus que deux perchistes masculins sont encore en liste pour le titre du soir : le Philippin Ernest Obiena et le Chinois Yao Jie. La pression monte d’un cran chez les deux protagonistes. Si Yao Jie passe sa barre à 5,82m, il établit un nouveau record de Chine. Mais malgré l’ambiance dans les tribunes, Y. Jie ne parvient pas à passer la barre. Avec 5,75m, il pulvérise tout de même son record personnel de 10cm. De son côté Obiena, troisième des Championnats du monde 2022, franchit dès le premier essai cette barre à 5,82m, synonyme des minimas pour les mondiaux à Istanbul. Le Philippin remporte donc cette édition du Perche en Or. Pour son dernier saut de la soirée, il décide de tenter une barre à 5,90m : trois échecs. Mais cela ne gâche pas sa première place. Il est donc suivi par Yao Jie, deuxième. Ethan Cormont complète le podium, grâce à un saut à 5,65m.

Six autres Français étaient présents. Mais ils ne se sont pas tous distingués, à l’image des frères Collet. Le cadet Thibaut qui n’a pas sorti le grand jeu, ne passant qu’une barre et échouant à trois reprises à 5,55m. À l’inverse, son frère aîné, Mathieu a fait un concours solide, malgré des essais chaotiques. Il a, en effet, passé les barres de 5,40m, 5,55m et 5,65m au troisième essai. “J’ai galéré, j’ai couru après les repères et les réglages pendant tout le concours. Je n’ai pas pu faire plus que quatre sauts. Après c’est le jeu, je n’ai pas réussi à m’adapter aux conditions. […] Ce n’est que la deuxième compétition, je ne suis pas inquiet pour la suite”, s’est confié Thibaut après son concours.

Un face à face Sutej-Murto chez les féminines

De leur côté, les femmes étaient quinze, dont cinq Françaises, à s’élancer sur la piste. Six débutent leur concours à 4,15m. Ça passe. À 4,30m, deux perchistes décident de faire une nouvelle impasse, pour débuter leur concours à 4,45m. Seule l’Ukrainienne Yana Hladiychuk n’arrive pas à passer cette seconde barre à 4,30m. Un concours que la jeune Ukrainienne passait dans des conditions particulières. “Il y a deux jours, j’ai perdu mon ami, un décathlonien. Il a été tué pendant la guerre. On a beaucoup pleuré, on ne peut jamais s’attendre à perdre un ami”, a-t-elle confié.

Plus que quatorze perchistes sont donc en compétition, et s’apprêtent à passer la barre charnière des 4,45m. C’est l’hécatombe : huit perchistes échouent à cette hauteur, dont les Françaises Elina Giallucharis, Alix Dehaynain, Margot Chevrier et Ninon Chapelle. La lilloise Alix Dehaynain a d’ailleurs réagi à sa performance : “Je suis plutôt déçue de ma fin de compétition, je me rate complètement. Mais je passe la barre en dessous [4,30m, ndlr] assez facilement donc c’est plutôt positif. Si je dois lâcher une perf’, ça va bientôt arriver.”

Après une barre à 4,65m, il ne reste plus que la Finlandaise Wilma Murto et la Slovène Tina Sutej. Toutes deux réussissent leurs sauts à 4,65m. Toujours deuxième au classement, Wilma Murto décide donc de faire l’impasse à 4,75m, et tente 4,80m pour se laisser une chance de remporter cette étape du Perche Elite Tour. Tina Sutej, qui a décidé de ne pas faire d’impasse, échoue à trois reprise à 4,75m. Tout repose donc sur la Finlandaise. Si elle franchit 4,80m, elle redevient première au classement. Elle échoue finalement à ses trois tentatives, et laisse la victoire à la Slovène Tina Sutej.

Bonnin et Emig, des performances remarquées

Ce samedi soir, ils n’ont pas gagné le concours, ils n’ont pas atteint le podium mais Marie-Julie Bonnin et Robin Emig ont confirmé les prémices du tout début de saison. Pour la première, franchir 4,45m ce samedi n’est que la suite logique de ses performances estivales. “MJ”, comme on la surnomme, a amélioré son record personnel de 39 centimètres dans cette période. Plus largement, la saison 2022 a été pleine pour la licenciée du Bordeaux Athlé ; championne de France Espoirs, vice-championne de France Élites, les Europe de Munich disputés et la découverte de la Diamond League.

Pour ce concours nordiste, M-J. Bonnin avait donc envie de bien faire. Ces 4,45m, record personnel en salle battu, viennent valider un travail de sape entrepris depuis de long mois. Encore très jeune (21 ans), celle qui partage sa chambre en équipe de France avec Margot Chevrier voudra rapidement confirmer cet élan. “Je suis contente, c’est assez compliqué en ce moment à l’entraînement. On essaie d’adapter un peu avec la cheville,  je saute sur des élans réduits,  j’ai des petites perches, nous disait-elle après coup. Toutes les compétitions que je fais pour l’instant ça me permet de prendre des plus grosses perches avec de plus gros élans”. Des performances signées malgré quelques complications. “Je n’ai aucune sensation en l’air, je ne ressens absolument rien quand je décolle. Mais bon ça me fait plaisir,  je me dis que j’ai de la marge.”

De la marge, lui, il n’en a pas. En tous cas pas encore. À 21 ans, Robin Emig est tout doucement en train de se faire une place dans le milieu de la perche française. Vainqueur du StarPerche de Bordeaux, en battant son record de 13cm, le médaillé de bronze aux championnats d’Europe U20 n’en finit plus d’étonner. À Roubaix encore, il a cette fois franchi 5,65m au premier essai, améliorant de fait une nouvelle fois son record. Trois échecs à 5,75m n’ont toutefois pas entaché sa superbe soirée. “C’était une très bonne compèt’. Les conditions sont top. J’étais plutôt en forme, je manque 75 donc je sors du podium mais ça me met la rage pour les prochaines compètes.”

C’est aussi le charme du Perche Élite Tour, des talents qui éclosent, parfois de manière inattendue mais toujours dans de grandes proportions. Les années précédentes, Margot Chevrier, Thibaut Collet ou Ethan Cormont y ont par exemple brillé. Emig est donc entré dans le grand monde à vitesse grand V. “Je connaissais un peu le Perche Élite Tour, je regardais tous les hivers sur mon iPad”, sourit-il. Des performances de choix qui s’enchaînent, on ne sait plus quoi souhaiter à Romain Emig pour la suite. En lui posant la question, il prend de longues secondes de réflexion, pour faire le point. “Allez 5,80m pour cet hiver je suis ravi“. Voilà qui est dit.

Pour Bonnin comme pour Emig, l’enjeu est le même : trouver de la constance dans le saut pour continuer à enchaîner les performances. Pour “MJ”, “le prochain objectif c’est les championnats d’Europe. C’est pour ça que je fais l’impasse sur les championnats de France espoirs”. Pour Romain Emig, quelques jours passés à Miramas arrivent avant de rallier Clermont-Ferrand pour les championnats de France en salle (19 février).

Justement, les championnats de France en Auvergne mi-février sont le prochain objectif à court terme de la plupart des athlètes présents à Roubaix. Cette étape nordiste a constitué une photographie intéressante des états de forme des uns et des autres. Mais la saison ne fait que commencer et tout reste à faire !