Colloque olympique et paralympique : enjeux de l’inclusion dans le sport
Le mercredi 8 février s’est tenu le premier colloque olympique et paralympique organisé par l’Université de Lille, ou COP 1 comme l’a nommé avec humour Régis Bordet, président de l’Université. À l’aube des JO de Paris 2024, il a été question d’inclusion au cours de ce colloque, avec la présentation de diverses initiatives ainsi que des discussions sur le sujet. Voici à quoi pourrait ressembler le sport pour tous.
Il est de croyance populaire de dire que le monde du sport est l’un des endroits où les différences s’effacent, ou du moins s’estompent, et que sur un terrain ou dans un couloir de nage, il n’y a plus que la performance qui prévaut, le reste n’est plus qu’accessoire. Pourtant, les problématiques liées au genre, à la couleur de peau ou à l’orientation sexuelle sont plus que jamais d’actualité, en témoignent les nombreux scandales qui secouent les différentes fédérations de sport en France. Au cours de ce colloque, il a été question de montrer comment des initiatives peuvent permettre une meilleure inclusion, pour faire du sport quelque chose d’accessible à tous, pour tous, et où tout le monde peut vivre ensemble.
Environnement et territoire
Portant sur divers sujets, les différentes conférences données ont soulevé des problématiques comme celle de l’accessibilité et de la possibilité de pratiquer le sport n’importe où. Dans une génération où la pratique d’une activité sportive est en chute, les intervenants ont eu à cœur de montrer les différentes innovations qu’ils ont mis en place pour faciliter la pratique. L’OMS recommande une heure d’activité physique d’intensité modérée à soutenue quotidienne pour les enfants âgés de 5 à 17 ans, un seuil que 50% des garçons et 33% des filles atteignent.
La Semaine Olympique et Paralympique (SOP), mise en place chaque année depuis la désignation de Paris comme ville-hôte des JO, est un dispositif qui permet de sensibiliser les milieux scolaires à la pratique sportive et à l’inclusion dans le sport. Au cours de cette semaine, des associations comme Bouger plus, vont pouvoir sensibiliser plus de deux millions d’enfants. L’association espère d’ailleurs que le dispositif sera étendu au-delà des JO 2024. La SOP aura lieu du 3 au 8 avril cette année. La SOP met aussi en place des infrastructures dans les villes pour faciliter une pratique sportive autonome. En ce moment, six villes-pilotes sont en phase de tests de “designs actifs”, dans le but de créer un environnement incitant à la pratique sportive. L’association propose aussi une pratique sportive encadrée sur le lieu de travail afin d’atteindre les recommandations de l’OMS, d’une pratique hebdomadaire de 150 à 300 minutes, pour les adultes et de lutter contre la sédentarisation au travail. Quand on parle d’inclusion et d’accessibilité, il convient de ne pas laisser de côté les personnes handicapées, souvent grandes oubliées de la pratique sportive. Frank Bodin (géographe urbaniste) et Sylvain Paillette (délégué général de l’association Jaccede) sont ainsi venus présenter l’application Uptimizy, un logiciel de diagnostic permettant de visualiser les conditions d’accessibilité des lieux accueillant du public et des structures urbaines. Il est alors possible de voir les niveaux d’accessibilité selon différents niveaux de gêne. Une application utile dans la vie de tous les jours et qui permet aussi d’améliorer l’accès à la pratique sportive pour les personnes handicapées. F.Bodin et S.Paillette ont aussi évoqué des villes comme laboratoire de cré-actions et de co-construction des territoires, afin de favoriser un accès pour tous au sport.
Intégration et inclusion
Ces problématiques physiques et géographiques qui rejoignent d’ores et déjà certaines problématiques morales ne sont pas les seules qui se posent quand il s’agit de pratiquer le sport. L’inclusion est une vraie préoccupation pour les acteurs du sport aujourd’hui, le schéma ci-dessous proposé par Frank Bodin et Sylvain Paillette montre bien ce que ce mot signifie pour eux et le monde du sport.
L’exclusion touche plusieurs groupes de population considérés comme minoritaires dans le monde du sport. Des initiatives sont donc mises en place pour pallier cela. Eric Florand était notamment présent pour parler de la Fondation Alice Milliat, dont il est l’un des membres fondateurs et le secrétaire général. La Fondation poursuit le combat d’Alice Milliat, qui s’est battue pour une véritable représentation des femmes dans le monde du sport et pour leur offrir un accès plus large au sport, autre que la gymnastique. La Fondation vise ainsi à développer le sport féminin et à mieux inclure les femmes dans le monde du sport qui est parfois à la traîne. À titre d’exemple, le 50 kilomètres marche n’a été ouvert en compétition aux femmes qu’en 2017. C’est pour cela qu’à son époque, Alice Milliat a créé des Jeux Olympiques réservés aux femmes, pour leur permettre un accès à la compétition, que le Comité Olympique ne leur accordait pas encore. Aujourd’hui, la fondation diffuse un documentaire sur la vie d’Alice Milliat, pour rétablir sa mémoire et poursuivre son combat pour l’inclusion des femmes dans le sport. Manuel Picaud est également venu parler de son association, FIER (Fondation Inclusion pour un Environnement Respectueux), qui lutte pour une meilleure inclusion dans le sport des personnes LGBTQIA+, et contre toutes les formes de discrimination en général. Il a relevé depuis plusieurs années des points d’exclusion pour les athlètes concernés (catégories binaires, sport genré…). Il observe également une invisibilité criante de ces athlètes. Pour faire face à cela, la fondation a publié un guide qui donne 17 préconisations aux clubs, fédérations et autres acteurs du sport pour faciliter la représentation des personnes LGBTQIA+ et faire de leur lieu de pratique du sport un lieu dit “safe” (sécurisé).
Placé sous le signe de l’inclusion, ce colloque devrait en appeler d’autres d’ici aux JO de Paris 2024 qui auront lieu l’année prochaine. Des jeux qui, les intervenants l’espèrent, permettront d’encore avancer dans l’inclusion de tous dans la pratique sportive pour mettre fin à plusieurs siècles d’exclusion pour de nombreuses personnes.