En lecture
Le FLOW a 10 ans : célébration d’une structure emblématique de la scène hip-hop du Nord

Le FLOW a 10 ans : célébration d’une structure emblématique de la scène hip-hop du Nord

© Justine Clastres / Pépère News Au premier plan STO et derrière lui d’autres rappeurs du label TNF, invités surprise de la soirée des 10 ans du Flow

Le Flow, Centre Eurorégional des Cultures Urbaines, a fêté ses 10 ans le 5 octobre. Situé au cœur du quartier Moulins, ce bâtiment emblématique se distingue par son caractère unique : il s’agit du premier espace entièrement consacré aux cultures urbaines. 

Après avoir célébré l’anniversaire du hip-hop l’an passé, c’est au tour du Flow de souffler ses dix bougies. Tout commence en 2014 lorsque Martine Aubry, maire de Lille et auditrice du morceau emblématique Ma lettre au président, engage une conversation avec le rappeur du nord AXIOM, croisé sur un quai de gare. À cette époque, il se montre réticent à l’idée de discuter avec la municipalité : “Normalement, les rappeurs ne parlent pas à la mairie, sinon t’es pas street. Pourtant, après réflexion, le rappeur perçoit une opportunité unique : celle de voir les institutions politiques s’ouvrir à la culture hip-hop. Ainsi elle revêtirait un nouvel écho, à une époque où ces deux mondes s’opposaient. 

Cette rencontre aboutit à un investissement de 12,4 millions d’euros pour construire le premier centre des cultures urbaines en Europe. Le Flow, avec cette volonté de devenir un lieu de référence, dédie un étage à chacune des quatre disciplines du hip-hop : le rap, le DJing, la danse et le graffiti. Inspiré par l’effervescence de la scène urbaine marseillaise, AXIOM s’est dit : « Si eux y arrivent, pourquoi pas nous ? ». Depuis, cette structure a inspiré Paris, qui dispose désormais également de son propre centre dédié aux cultures urbaines, et bientôt Bruxelles.

Aujourd’hui, AXIOM exprime sa reconnaissance : « Martine Aubry a accueilli notre culture à bras ouverts ». Lors de la conférence de presse, alors que Marie-Pierre Bresson, chargée de la culture à la mairie de Lille, prend la parole, AXIOM souligne avec fierté : « On a la chance d’avoir une élue qui parle de hip-hop. Vous avez déjà vu ça dans d’autres villes ?« 

Des festivités mettant à l’honneur les artistes de la région

© Justine Clastre / Pépère News

 

Le 5 octobre, la structure a célébré comme il se doit l’aboutissement d’un « pari fou » mais réussi. L’après-midi était consacré aux arts visuels, avec des ateliers de graffiti, une initiation à la danse, la projection d’un moyen métrage et une chorégraphie inédite. La soirée, quant à elle, a été rythmée par plusieurs DJ sets lillois, notamment ceux de DJ Sims, May Din et Kzco (figure musicale incontournable de la Next Gen lilloise). Le rap était aussi à l’honneur, avec des performances enchaînées, à commencer par Eesah Yasuke et l’équipe de TNF dont font notamment partie Bekar et STO.

 

 

© Justine Clastre / Pépère News

“Sans eux, ma carrière n’aurait pas été la même”

Après 10 années, le Flow peut regarder sa jeune histoire avec fierté. En tant que lieu d’accompagnement et de formation, nombre de jeunes artistes nordistes s’y sont professionnalisés. Cela passe par des dispositifs de repérage tels que des concours de beatmaking ou le Buzz Booster (événement national dédié à la scène rap), ainsi que divers types de soutiens, qu’ils soient humains, financiers, ou spécifiques à chaque discipline, comme les ateliers d’écriture ou des résidences artistiques, qui permettent d’apprendre à se produire sur scène.

Aujourd’hui, un grand nombre d’artistes ayant bénéficié de ces aides revendiquent le rôle pilier de la structure dans leur carrière, comme Ben PLG qui affirme en story “sans eux, ma carrière n’aurait pas été la même”. Le nordiste avait par ailleurs tourné son fameux clip Mauvaise Nouvelle dans le local à poubelle du Flow, pour finalement cumuler 3 millions de vues sur YouTube.

Beaucoup entretiennent toujours un lien avec le centre : “Ici, c’est la maison, je reviens à la source quand j’y suis.”, clame Eesah Yasuke. D’autres, comme Bekar, avec qui la collaboration remonte à 2018 pour sa participation au Buzz Booster, profitent aujourd’hui d’une renommée qui dépasse la scène lilloise. L’artiste a fièrement brandi son disque d’or lors de son apparition surprise : “évidemment qu’on l’a rapporté ici, c’est la maison, là où tout a commencé”.

Assurer la prospérité des cultures urbaines

« Aujourd’hui, les disciplines ne se côtoient plus vraiment. » explique AXIOM. Si l’industrie du rap domine les plateformes de streaming, les autres disciplines n’ont pas suivi la même trajectoire. Ce n’est que récemment que le rôle du beatmaker a commencé à être reconnu, tandis que les danseurs et les graffeurs reçoivent encore peu de visibilité. Le Flow semble alors être la solution : en organisant divers événements autour de ces disciplines et en leur dédiant chacun un espace (un étage complet), le centre favorise la synergie entre elles afin de contribuer ensemble à la culture hip-hop.

© Lilian Nowak / Pépère News

Si AXIOM a eu l’idée de créer le Flow, c’était aussi pour garantir un lieu où les valeurs du hip-hop sont préservées. Il dénonce le mépris de certains politiques envers cet art, ainsi que la menace qui pèse sur sa pérennité dans un contexte où l’extrême droite est aux portes du pouvoir. Lors de son concert, la rappeuse Eesah Yasuke n’a pas manqué de s’adresser à son public, les appelant à faire un grand doigt d’honneur à une extrême droite symbole de cette menace croissante.

© Justine Clastre / Pépère News

Le Rassemblement National au pouvoir pourrait en effet affaiblir toute la culture, notamment le hip-hop, par la suppression du statut d’intermittent du spectacle ou la privatisation de l’audiovisuel public. Ces entraves ont déjà été observées à travers les politiques locales des villes de Béziers, Fréjus, ou encore Hénin-Beaumont, où les maires coupent les subventions aux associations et contrôlent les bibliothèques publiques.

Le Flow, fruit d’une collaboration entre la mairie et des activistes de la scène hip-hop, se présente ainsi comme un véritable symbole de résistance face à ces dérives, affirmant haut et fort l’importance de la culture urbaine et son rôle dans la lutte contre l’intolérance.

Quelle est votre réaction ?
J'adore !
4
J'ai hâte !
0
Joyeux
0
MDR
0
Mmm...
0
Triste...
0
Wow !
0

Auteurs/autrices

Voir les commentaires (0)

Répondre

Votre adresse Email ne sera pas publié

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.