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Liquidation judiciaire de Camaïeu, le constat d’un entrepreneuriat français toujours plus en difficulté

Liquidation judiciaire de Camaïeu, le constat d’un entrepreneuriat français toujours plus en difficulté

Camaïeu,_Italie_2,_Paris_5_April_2013

Mercredi 28 septembre, après des mois de lutte dans l’espoir de sauver Camaïeu, c’est le coup de massue pour les salariés de l’entreprise de prêt-à-porter. Le tribunal de commerce de Lille a rendu sa décision : c’est la liquidation judiciaire pour le groupe et ses 511 magasins dans l’Hexagone.

La décision est tombée : Camaïeu, enseigne phare de l’habillage en France, ferme ses portes après 38 ans de service. Malgré de premières difficultés économiques dès le milieu des années quatre-vingt-dix, la firme roubaisienne revendique 750 millions d’euros de bénéfices en 2018. Elle est pourtant rachetée deux ans plus tard, en 2020, par “Hermione People & Brands” (HPB) pour la somme symbolique de deux euros. La reprise de la marque ne suffit pas. Elle finit par succomber à la trop forte concurrence et à la crise du COVID-19 particulièrement rude pour le secteur de la mode.  

Le déclin d’un géant de l’habillement français

Depuis le mois de juin, Camaïeu était sous redressement judiciaire, signe d’une situation déjà grave. Faute de fonds nécessaires au paiement des salaires du mois de septembre, la liquidation est envisagée, puis prononcée à peine trois jours plus tard, au tribunal de commerce de Lille. C’est la douche froide pour les salariés, en dépit de l’état financier alarmant déjà connu des 2.600 employés qui se retrouvent sur le carreau moins d’une semaine après la proclamation de la décision. Le groupe et ses 511 magasins dans l’Hexagone vont devoir fermés, une situation dramatique qui témoigne du déclin du géant de l’habillement français. 

Quand les mesures ne suffisent plus…

Chez les employés comme chez les clients, un sentiment domine, l’écœurement. C’est en effet avec une profonde tristesse que les vendeurs et vendeuses ont clos définitivement les portes de leurs magasins samedi 1er octobre. Pourtant, les derniers jours de Camaïeu ont déclenché de vastes élans de soutien dans tout le pays, comme à Vesoul, en Haute-Saône, où les clients se sont déplacés en masse pour exprimer leur soutien. Ceux-ci n’ont cependant pas su enfouir la déception et l’amertume ressenties par tous. De leur côté, les syndicats laissent paraître leur colère en occupant le siège de la firme à Roubaix. 

Les difficultés n’étaient pas récentes pour le groupe, néanmoins, la pandémie a démultiplié les problèmes financiers. En effet, la situation du secteur de la mode et notamment de la “fast fashion” se fait toujours plus épineuse ; avec l’émergence d’une concurrence féroce, il est complexe de réussir à se démarquer. Camaïeu n’a pas su faire face aux nouveaux enjeux de l’industrie : coûts de production en hausse, irruption de la seconde main, prix de vente toujours plus bas. Elle n’a donc pas été épargnée et a finalement succombé aux pressions plurielles. 

Une situation qui risque de se reproduire ?

D’après l’Insee, le premier confinement mis en place entre mars et mai 2020 a provoqué un recul de l’activité économique du pays de 19% au deuxième trimestre de l’année. Alors, si le cas de Camaïeu fait la une, il n’est pourtant pas si rare. 

Malgré le “Quoi qu’il en coûte” du président Macron répété depuis le début de la pandémie, le commerce français accuse le coup suite à près de deux ans d’arrêt économique presque complet. L’adage d’E. Macron n’aura pas suffi à sauver la société puisque l’État a renoncé à apporter une avance décisive, estimée par les syndicats à 48 millions d’euros.

Au lendemain de la crise sanitaire, la chute d’un géant du prêt-à-porter pose question dans une économie où tout reste incertain. D’autant plus que l’entrepreneuriat français, mis sur un piédestal par le président Macron, n’est plus imperméable, il ne peut visiblement plus être protégé à tout prix. Chaque décision a un prix dans une position financière aussi délicate que celle d’un monde post-COVID-19. Le gouvernement en est conscient, il faut faire des choix et pour relancer le pays, il a fait celui de l’industrie et non du commerce. Il a considéré que la marque était une cause perdue dans la mesure où elle survivait sur ses financements et non plus ses bénéfices, la rendant inutile à la croissance.

Pour rappel, Camaïeu détient, en 2018, 11% des parts du marché. Comment, en à peine quatre ans, une entreprise si puissante peut-elle péricliter jusqu’à l’écroulement total ? La situation singulière des dernières années n’est pas près de s’apaiser, il suffit d’observer le cas ukrainien, couplé de l’augmentation inquiétante des coûts de l’électricité et de l’énergie. 

Ceci dit, la croissance française atteint tout de même 2,6% en 2022, il faut croire que le commerce ne se laisse pas abattre. Si l’entrepreneuriat en France doit s’attendre à de nouveaux défis, il est capable de s’adapter et de se redresser.

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