Retour sur « Open Museum », une exposition originale sur les jeux vidéo
Le palais des Beaux-Arts de Lille a récemment « invité » le jeu vidéo au sein de ses collections permanentes, avec une exposition intitulée Open Museum. S’il n’est pas le seul ni le premier musée à l’avoir fait -une exposition sur l’Art dans le jeu vidéo avait déjà eu lieu à Paris au Hazard Ludique en 2015- cet évènement est pourtant très original et convient même à des publics étrangers au domaine du jeu vidéo.
Loin de ne proposer qu’un petit sanctuaire sur les jeux vidéo dans une salle réservée aux expositions temporaires, comme le font certains musées, Open Museum est une collection qui amène vraiment le spectateur à déambuler dans tout le musée, au travers d’un parcours en 18 étapes.
Une muséographie très réussie qui cherche à toucher de nouveaux publics
Depuis quelques années, les musées tentent d’attirer de nouveaux publics fréquentant d’habitude peu cette sphère culturelle. Parmi eux, on retrouve souvent les jeunes puisque, comme le montre le récent rapport du ministère de la culture, en 2023 seul 14% des jeunes entre 18 et 29 ans s’y sont rendus au moins 3 fois au cours des 12 derniers mois, soit le pourcentage le plus faible tous âges confondus. C’est pourquoi les musées décident de proposer des expositions qui pourraient plaire à un public néophyte qui ne serait pas allé spontanément dans ce genre de lieux.
Cela passe la plupart du temps par l’achat et l’installation d’œuvres contemporaines qui ont soit pour but de faire parler, et ainsi d’attirer de nouvelles personnes, curieuses du buzz produit par la présence de cette œuvre, soit pour objectif d’ancrer le visiteur dans le présent à travers des œuvres qui font écho à l’actualité.
Une mise en scène des jeux vidéo très originale
Cette volonté d’amener de nouveaux visiteurs peut ne pas être très subtile, mais au palais des Beaux-Arts de Lille le pari est réussi. Loin d’exposer une œuvre qui n’a rien à voir avec le reste de la pièce, le musée se sert justement de celles déjà présentes afin d’expliquer les règles et techniques du jeu vidéo.
Par exemple, dans la salle de plan-reliefs, nous pouvons voir des plans d’univers de jeux vidéo ainsi que les différents métiers qui peuvent y être associés tel que le level designer (concepteur de niveaux de jeu vidéo), qui fait partie de l’équipe en charge de la création du jeu vidéo. Nous pouvons aussi observer, dans la salle des sculptures, des bustes de personnages ainsi qu’une explication de l’importance jouée par l’avatar dans ce milieu.
De plus, cette exposition marque aussi l’évolution du traitement des jeux vidéo dans la société. En effet, là où avant le jeu vidéo était beaucoup critiqué et vu comme quelque chose de solitaire qui éloignait les adolescents des autres, cette exposition prend le contrepied de cette idée reçue, faisant rentrer le jeu vidéo dans l’industrie de l’art à part entière et en montrant plutôt ses côtés fédérateurs.
Une place assumée dans l’industrie de l’art
Le lien entre les joueurs se voit notamment dans la dernière pièce consacrée à l’E-Sport et les évènements liés au jeu vidéo. En effet, cet espace montre les attachements qui peuvent se tisser autour de ce domaine notamment a travers des compétitions de jeux vidéo en public.
De plus en plus, nous assistons donc à un rapprochement entre le jeu vidéo et le monde artistique. Mieux, le monde du gaming influence désormais de façon majeure les autres genres artistiques tels que l’on peut le voir à travers l’exposition “Carte Blanche à Tino Sehgal” au palais de Tokyo, où l’artiste invite le spectateur à échanger avec les autres, principe que l’on retrouve dans les jeux vidéo.
Une évolution de la considération du jeu vidéo
Dorénavant, le jeu vidéo est un art et n’est plus considéré comme un produit purement commercial. Cela s’explique par le nombre grandissant de joueurs mais aussi (et surtout) par sa grande diversité de thématiques qui se rapproche de celle des contenus que l’on peut retrouver à travers d’autres domaine artistiques tels que le cinéma.
La croissance de la popularité du jeu vidéo, au-delà de cette exposition, se retrouve aujourd’hui dans le Project Odyssey, un ambitieux projet de musée du Jeu vidéo en France, lancé par le vidéaste Tev (Ici Japon) et Ludovic, le propriétaire de la plus grande collection de consoles de jeux au monde.