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Meeting combatif pour les Insoumis à Roubaix

Meeting combatif pour les Insoumis à Roubaix

De gauche à droite : Alma Dufour, Carlos Bilongo, Shéhérazade Ben Torki et David Guiraud, lors d'un meeting le vendredi 2 décembre © Alice Gosselin

Ils étaient une petite centaine ce 2 décembre à se masser au théâtre Pierre de Roubaix pour suivre un meeting axé sur l’inflation. David Guiraud, Alma Dufour et Carlos Bilongo, figures de la nouvelle génération du parti, sont venus sabrer l’inflation et la politique du gouvernement.

Pas besoin de leur marteler les chiffres en meeting, les Roubaisiens connaissent très bien les conséquences de la vie chère. Dans ce bastion ouvrier, où plus de 40% des ménages sont sous le seuil de pauvreté, l’explosion des coûts est particulièrement douloureuse. Le thème du meeting était donc pertinent. Avec ses comparses Alma Dufour et Carlos Bilongo, David Guiraud, député de la huitième circonscription (Roubaix et Wattrelos), est justement venu présenter les mesures anti-inflation de la France insoumise. Les trois parlementaires en ont profité pour haranguer leurs sympathisants, les préparant aux luttes sociales à venir.

Contre le front néo-libéral

Après un bref clip de campagne – les insoumis donnent l’impression d’être en campagne permanente – c’est le député Carlos Bilongo (huitième circonscription du Val-d’Oise) qui débute le meeting. Il décrit sa rencontre avec des Roubaisiens précaires, victimes de l’inflation et des “propriétaires véreux”. “Dix millions de Français sont à l’aide alimentaire” martèle Carlos Bilongo (ils seraient en réalité  entre deux et sept millions). Le député du Val-d’Oise blâme la politique macroniste, incapable selon lui de répondre à ces problèmes. “Cela fait huit ans qu’Emmanuel Macron est au pouvoir” rappelle-t-il, soulignant que le président était déjà ministre de l’Economie en 2014.

“Plus on est précaire, moins on les gêne. On vous met sur un côté, à l’écart du monde politique, du monde économique” – Carlos Bilongo

Bilongo s’insurge contre la “désorganisation organisée des services publics” dont serait responsable le gouvernement, que ce soit “à l‘école, dans les transports ou dans les hôpitaux”. Il déplore l’abstention massive, qui a atteint 67,5% à Roubaix aux dernières législatives. La population roubaisienne, jeune, désargentée et souvent immigrée, s’est d’ailleurs tournée massivement vers la France insoumise lors des derniers scrutins.

Une incarnation de cette France des classes populaires que la gauche dit représenter. Bilongo lui oppose le “front néolibéral”, qu’il fait aller de Renaissance au Rassemblement national. Avec 69% des sièges à l’Assemblée, ce “front” est en mesure de contrecarrer la plupart des projets de la gauche. “Plus on est précaire, moins on les gêne. On vous met sur un côté, à l’écart du monde politique, du monde économique”, juge Carlos Bilongo.

Le député LFI de la huitième circonscription du Nord, David Guiraud, lors d'un meeting le vendredi 2 décembre © Alice Gosselin
Le député LFI de la huitième circonscription du Nord, David Guiraud, lors d’un meeting le vendredi 2 décembre © Alice Gosselin

 “Ils ne sont grands que parce que nous sommes à genoux”

La députée de la quatrième circonscription de Seine-Maritime, Alma Dufour, prend la suite. Dans une allocution dense, riche en chiffres et en métaphores, elle attaque systématiquement la politique du “président des riches”. “On est dans une période d’abondance” lance-t-elle, avec un brin de provocation, “les dividendes mondiaux ont atteint 1.560 milliards de dollars en 2022, et pourraient dépasser les 50 milliards d’euros en France”. “C’est cinq fois le coût de la garantie jeunes que nous voulons mettre en place”, rappelle Alma Dufour. La France insoumise souhaite effectivement octroyer un revenu mensuel de 1.063 euros à tous les jeunes de 18 à 25 ans, qui coûterait entre 10 et 12 milliards d’euros.

Alma Dufour n’arrête pas là son avalanche statistique. La législatrice pointe les bénéfices records du pétrolier Total et de l’entreprise de transport maritime CMA-CGM, qui ont tous deux profité de la crise. Ces deux groupes ont pourtant payé très peu d’impôts en France, profitant d’un système d’imposition avantageux pour les multinationales. Une situation insupportable pour l’insoumise, qui accuse crûment ces grands groupes de “foutre la merde dans l’économie française”.

“Ce ne sont pas des sandwiches qu’on sert aux étudiants, c’est des gifles dans la face” – Alma Dufour

L’insoumise critique “l’inaction du gouvernement” sur le réchauffement climatique, l’accusant de s’être “tourné les pouces” au lieu d’engager une transition énergétique viable. “On est le pays des Lumières, on va devenir le pays des black-out”, ironise-t-elle, rappelant qu’Emmanuel Macron avait promis qu’il n’y aurait pas de coupures de courant.

Alma Dufour le juge aussi coupable d’avoir “abandonné” des pans entiers de la population, notamment les jeunes. Un étudiant sur deux ne mange pas à sa faim” déplore l’élue, faisant porter au gouvernement la responsabilité des “suicides et des maladies mentales qui ont beaucoup augmentés chez les jeunes”. A. Dufour prend l’exemple des menus du Crous, dont la qualité a baissé à cause de l’inflation. “Ce ne sont pas des sandwiches qu’on sert aux étudiants, c’est des gifles dans la face”, fustige-t-elle.

La députée juge les dépenses publiques insuffisantes. “On nous dit qu’elles augmentent, mais en réalité, avec la croissance démographique et l’inflation, c’est loin d’être suffisant“, estime la députée normande. “C’est pour les riches de ce monde que nous souffrons autant”, s’enflamme-t-elle, “ils sont en guerre contre nous”. L’insoumise conclut son discours embrasé avec cette sentence : “Ils ne sont grands que parce que nous sommes à genoux.” 

Un prélude aux combats futurs ?

Le député de Roubaix David Guiraud conclut le meeting. Dans une allocution particulièrement offensive, où il se dit prêt à “plier en deux” les macronistes, en s’attaquant lui aussi à la politique gouvernementale, fustigeant un gouvernement “minoritaire” qui “tire des 49.3 en rafale [l’article de la Constitution qui permet de faire exceptionnellement adopter une loi sans qu’elle soit votée, NDLR]”. Si cette méthode a tenu la gauche en échec jusque-là, D. Guiraud promet que “sur d’autres propositions de lois, il existe des majorités alternatives”. Combatif, le député roubaisien prend exemple sur les salariés de Camaïeu présents au meeting, qui se battent pour leur droits après avoir été licenciés. Le parlementaire regrette aussi qu’à partir de l’année prochaine, la ristourne sur le carburant ne soit réservée qu’à certains “gros rouleurs”“À Roubaix, à Wattrelos, dans les campagnes, ce sont tous des gros rouleurs, ils en ont besoin pour travailler”, s’insurge-t-il. Dans sa circonscription, 72,2% des habitants utilisent une voiture pour aller travailler.

Il défend les mesures de la France Insoumise face à l’inflation : augmentation des salaires, taxation des superprofits, blocage des prix sur les matières premières. Cette dernière proposition est critiquée par de nombreux économistes, qui estiment qu’elle profiterait d’abord aux plus riches en n’étant pas assez ciblée. Elle est aussi accusée d’augmenter le risque de pénurie, car les producteurs n’auraient pas de raison de produire plus si les prix étaient bloqués. Si l’on ajoute à cela une hypothétique augmentation du salaire, cela risquerait d’annihiler les marges déjà faibles de certaines entreprises. Interrogé à ce sujet après le meeting, David Guiraud répond que “si la mesure profite aussi aux plus riches, tant mieux pour eux. Quand on bloquera le prix de l’essence, c’est l’essentiel du peuple français qui va en bénéficier.” Quant au problème des marges, il estime que “ce sont les grandes surfaces qui les détruisent”. Il prend l’exemple “des producteurs de lait, qui vendent à perte, pendant que  [les grandes surfaces] se font des marges totalement délirantes [selon le dernier rapport de  l’Observatoire de la formation des prix et des marges, celles-ci atteindraient  1,7% après impôt]”.

On le sent, les trois députés de gauche cherchent à préparer la foule pour les combats sociaux à venir. Celui du 15 décembre prochain, par exemple, où l’Assemblée nationale va examiner la réforme des retraites, malgré l’opposition d’une grande partie de la population. S’ils ne sont pas majoritaires à l’Assemblée, les insoumis comptent sur le soutien de la rue pour peser sur les débats.

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