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Le Garçon et le Héron, reconstruire les traumatismes de l’enfance par l’imagination

Le Garçon et le Héron, reconstruire les traumatismes de l’enfance par l’imagination

Seconde Guerre Mondiale, Tokyo. Un incendie ravage un hôpital. Mahito, 11 ans, y perd sa mère. Il déménage chez sa nouvelle belle-mère, Natsuko, et rencontre un mystérieux héron. C’est l’histoire d’un jeune garçon, bouleversé entre le deuil et l’acceptation d’un nouveau membre dans sa famille. Préparez vos pop-corns, éteignez vos portables et installez-vous confortablement dans votre siège. Le douzième et dernier long-métrage d’Hayao Miyazaki, commence. (Attention, spoiler!)

À 82 ans, Hayao Miyazaki semble inépuisable. Après Mon Voisin Totoro (1988), Le Voyage de Chihiro (2001), ou encore Ponyo sur la falaise (2008), le réalisateur n’a, encore une fois, pas respecté sa promesse. Après une énième annonce de retraite en 2013, il revient sur le grand écran avec un nouveau long-métrage d’animation. Prévu pour 2019 sous le nom « Et vous, comment vivrez-vous ?« , Le Garçon et le Héron sort finalement au Japon le 14 Juillet 2023, et le 1er Novembre en France.

Un adieu tant attendu

Longtemps attendu par les fans, ceux-ci l’interprètent comme un ultime adieu, adressé à son petit-fils, mais aussi à son public. Pour ce dernier au revoir, ils se sont mobilisés en force pour remercier le parrain de l’animation.

Des salles bondées, des enfants, des parents, des jeunes, et des moins jeunes : toutes générations, le sourire aux lèvres, prêtes à marquer le deuxième meilleur démarrage pour un film d’animation de l’année (Super Mario Bros ayant raflé tous les records de démarrage de 2023) avec 145 000 entrées en ce premier jour. Carton plein pour le réalisateur, pour qui ce lancement fut le meilleur de toute sa carrière.

 

Photo d’Hayao Miyazaki © 大臣官房人事課 (Wikimedias Commons)

 

 

Une beauté onirique

On dit toujours qu’il ne faut pas juger un livre à sa couverture. Il en est de même pour les films de Miyazaki, qui comportent souvent cette dichotomie d’une histoire sombre illustrée par un univers onirique, somptueux et coloré. Il faut le reconnaître, le maître a encore frappé. Nous aurions presque envie de prendre la place de Mahito et de vivre dans cette demeure magique, si l’on oubliait l’omniprésence de l’étrange héron.
D’où la question qui agite un certain nombre de parents : peut-on réellement emmener nos enfants visionner ce dernier film ?

Un douloureux cauchemar

Dès le début du film, le spectateur est renversé par la violence de la Seconde Guerre mondiale, la mort, le deuil et la souffrance vécus par ce qui nous apparait comme un jeune homme livré à lui-même. Loin d’être effacée après des années de bouleversements familiaux et personnels, cette souffrance est exprimée brutalement : on est face à un adolescent froid, au visage constamment fermé, renfermé sur lui-même, et dont le harcèlement le mènera à l’automutilation.

L’horreur continue avec l’apparition de la figure de l’antagoniste, un héron cendré mi-humain, mi-héron effrayant, mais aussi par l’omniprésence de la pression psychologique qu’il exerce sur Mahito. Un père absent émotionnellement, une mère disparue et une belle-mère qui semble vouloir la remplacer.

La boucle est bouclée

Comme à son habitude, Miyazaki nous présente un film émouvant qui parle à tout le monde. La perte d’un proche et l’acceptation de l’autre dans sa famille, sont des thèmes évocateurs pour toutes les générations. C’est aussi une critique du monde et de ses conflits incessants.

La mystérieuse tour venue du ciel symboliserait le traumatisme de l’arme nucléaire. Les différentes menaces et les oiseaux incarnent quant à eux la pensée marxiste du réalisateur, métaphore du capitalisme qui saccage l’art, le pille comme il pille le monde.

L’art et l’imagination sont au cœur de ce film, puisqu’il émet, notamment au travers du multivers, une éventuelle transmission. Cette œuvre est une conclusion de l’ère Miyazaki, en reprenant les thèmes de l’enfance et de la vieillesse, l’association privilégiée de l’animateur, et par les multiples références à ses précédentes œuvres incarnées par les sept vieilles (dames).

Des spectateurs partagés

Premier novembre, jour de sortie. Il est 19h, les fans sortent de l’UGC Lille et sont encore émerveillés. Noé, 18 ans, nous avoue : « Étant fan de Miyazaki, j’en attendais beaucoup de ce film et je n’ai pas été déçu. On ressent énormément l’univers de Miyazaki dans chaque scène, avec beaucoup de références à ses films précédents. Les visuels sont très nostalgiques, se rapprochent des anciens Ghibli et nous changent de la 3D présente partout de nos jours.  Je n’irais pas jusqu’à dire qu’il deviendra un classique car l’histoire du film est plutôt difficile à comprendre et passe par de nombreuses métaphores… mais il était tout de même excellent ! »

Pour certains fans, c’est pourtant une « grosse déception », due à une histoire « sans trop de sens », ou « trop violente » comme l’on peut lire sur Twitter. Beaucoup d’incompréhensions qui en laissent certains perplexes, prêts à le revisionner.

À découvrir depuis le 1er novembre au cinéma, les adeptes du grand écran peuvent se rendre à l’UGC Lille ou au Kinépolis de Lomme. Pour les plus casaniers, il leur faudra encore attendre une petite année avant de pouvoir faire une séance canapé-Netflix.

 

 

 

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