En lecture
À Marquette, la mobilisation se poursuit en musique chez Vertbaudet

À Marquette, la mobilisation se poursuit en musique chez Vertbaudet

L'entrée du site Vertbaudet à Marquette-lez-Lille © Arthur Louis (Pépère News)

Ce mardi 2 mai, le “festival des VertsBaudets” a pris place devant l’entrepôt logistique de Vertbaudet à Marquette-lez-Lille (59). L’évènement se tenait en soutien aux salariés grévistes qui dénoncent, depuis sept semaines, le refus de l’enseigne de les augmenter dans un contexte de forte inflation.

L’après-midi s’achève et le soleil brille encore dans le ciel nordiste. Entre les grands entrepôts en taule de la zone industrielle de Marquette-lez-Lille, les drapeaux CGT claquent au vent. C’est devant l’entrée de leur usine que 80 salariés de Vertbaudet, principalement des femmes, ont installé leur piquet de grève. Depuis sept semaines, des abris bâchés, des murs de pneus et des pancartes ont été érigés pour tenir la lutte face à la direction de l’entreprise, née à Tourcoing, qui n’avait jamais connu un tel mouvement social. Ce mardi, pour la deuxième fois, des concerts se sont succédés pour soutenir les grévistes et entretenir un moral qui ne flanche pas.

Un bras de fer qui dure et qui divise

La mobilisation tient depuis le 20 mars, c’est-à-dire depuis que les ouvriers ont appris que leurs salaires n’augmenteraient pas lors des négociations annuelles obligatoires (NAO). En compensation, la direction suggère des heures supplémentaires et des primes pour arriver à un équivalent de 6% d’augmentation. “On nous propose 20 heures supplémentaires pour gagner 220€ en plus par mois. On a un taux de maladies professionnelles énorme, ce sont des femmes qui sont cassées. Comment peut-on leur demander de faire 20 heures supplémentaires ?”, proteste Manon Ovion, déléguée CGT chez Vertbaudet à Marquette, entre deux interviews pour les quelques caméras locales et nationales venues couvrir l’évènement.

“Ce qu’on veut c’est un peu plus d’argent pour vivre et que cela compte pour notre retraite”- Manon Ovion

C’est elle qui a pris la tête de ce mouvement qui rassemble notamment des brodeuses et des préparatrices de commandes. Des femmes, précaires, qui dénoncent des salaires trop bas face à l’inflation et qui sont loin de dépasser le SMIC après parfois plusieurs décennies de carrière. “Ce qu’on veut c’est un peu plus d’argent pour vivre et que cela compte pour notre retraite, ce qui n’est pas le cas des primes” explique la déléguée CGT. Ces salariées ont engagé un bras de fer avec la direction qui, de son côté, cible le caractère minoritaire du mouvement.

Juste à côté des grévistes, à l’intérieur de l’usine, ce sont effectivement près de 200 salariés qui continuent de travailler. Aux dernières élections professionnelles, la CGT, qui organise la mobilisation, est arrivée derrière Force Ouvrière et la CFTC, syndicats majoritaires dans l’entreprise et qui ont signé les accords proposés par l’entreprise. Parmi les non-grévistes, certains ont même ouvertement dénoncé le climat de tension créé par ce mouvement social.

Manon Ovion, déléguée CGT Vertbaudet, répond à la presse © Arthur Louis (Pépère News)
La grève a été suivie par les médias régionaux et nationaux. L’occasion pour Manon Ovion, déléguée CGT, de faire entendre ses revendications © Arthur Louis (Pépère News)

Des soutiens qui dépassent les frontières du Nord

Mais le soutien reçu de toutes parts semble encourager les ouvrières en lutte, qui, loin de se sentir en minorité, soulignent plutôt un élan de solidarité inédit. “C’est magnifique ce qu’il se passe, il faut le vivre pour comprendre. On est surprises de l’élan de solidarité. Tous les jours des gens viennent sur le piquet, nous rapportent de l’argent, viennent nous soutenir moralement, on en a besoin surtout au bout de sept semaines”, se félicite Manon Ovion.

Il faut dire que le contexte social semble jouer en leur faveur après des mois de mobilisation contre la réforme des retraites partout en France et un coût de la vie qui n’arrête pas de s’alourdir. “Ce qu’on demande est légitime, on en a besoin, avec l’inflation c’est vital”, affirme celle qui est préparatrice de commande depuis 10 ans chez Vertbaudet.

“C’est une lutte exemplaire […], on sera là jusqu’au bout pour les soutenir”- Jean-Paul Verdière

Un constat partagé par Jean-Paul Verdière de l’Union Locale CGT de Seclin, venu soutenir le mouvement et assister au concert du jour : “Les gens en ont ras-le-bol. Tout le monde est prêt à se battre jusqu’au bout. D’ailleurs, lors du défilé du 1er mai, on avait 50% de gens qu’on n’avait jamais en manifestation avant.” Ce moustachu de 72 ans, fidèle à la lutte sociale, reste admiratif du combat mené chez Vertbaudet : “C’est une lutte exemplaire, sept semaines de grève, sur 50 ans de syndicalisme je n’ai jamais vu ça. À Seclin nous avons décidé de les aider en leur versant près de 2.000€. On vient quasiment tous les deux jours, elles le méritent, on sera là jusqu’au bout pour les soutenir.”

Autour de lui, les chasubles rouges de la CGT symbolisent l’élan de solidarité. Sur le dos d’une femme, on peut lire “CGT Hôpital de Tourcoing “, à côté d’elle un homme revêt les habits de l’Union Locale de Tourcoing. Près du bar improvisé, c’est la FNAF-CGT qui est là, plus loin, un membre de la CGT Cargill assiste au concert. Son entreprise a, elle aussi, connu des grèves successives en 2020 puis en 2021.

Le soutien est venu de plus loin puisqu’à peine élue, c’est la nouvelle secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet, qui était venue sur le site, qualifiant au passage le patron de Vertbaudet de “patron voyou“. L’élan a même dépassé les frontières nationales comme en témoigne la banderole “Tax the rich” accrochée sur le piquet de grève par le Parti du Travail de Belgique.

Des syndicalistes de tout le département sont venus soutenir la grève mardi soir devant l'entrepôt Vertbaudet de Marquette-lez-Lille © Arthur Louis (Pépère News)
Des syndicalistes de tout le département, comme ici ceux de Seclin, sont venus soutenir la grève dans la bonne humeur, mardi soir, devant l’entrepôt Vertbaudet de Marquette-lez-Lille © Arthur Louis (Pépère News)

Entre les cornets de pop-corn, les barbes à papa, le barbecue et le couscous vendus pour renflouer la caisse de grève, la fête continue devant l’entrepôt et on pense déjà à l’après. Au micro, l’optimisme est de mise : “Il ne nous reste que quelques jours”, espère-t-on. D’ailleurs, au-delà des salaires, ce sont les conditions de travail que les grévistes veulent améliorer, pour les employés sous contrat mais aussi pour les intérimaires dont la CGT réclame l’embauche.

L’optimisme est aussi palpable du côté de la direction et notamment chez le directeur des ressources humaines de Vertbaudet, Stéphan Fertikh qui espérait, au même moment sur BFM Grand Lille, “trouver un compromis”. Les deux parties, si ambitieuses soient-elles, devraient à nouveau se faire face. Au tribunal d’abord, où l’entreprise pourrait être condamnée pour avoir eu recours à des intérimaires pour remplacer les grévistes. Puis, lors d’une réunion entre les organisations syndicales et la direction, qui s’annonce houleuse.

Quelle est votre réaction ?
J'adore !
3
J'ai hâte !
0
Joyeux
0
MDR
0
Mmm...
2
Triste...
1
Wow !
0

Auteur/Autrice

Voir les commentaires (1)

Répondre

Votre adresse Email ne sera pas publié

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.