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Germinal, l’adaptation d’un roman ancré dans les mines du Nord

Germinal, l’adaptation d’un roman ancré dans les mines du Nord

Photo de présentation de la série

L’adaptation de Germinal, réalisée par David Hourrègue et primée au festival Séries Mania de Lille, dépoussière le mastodonte d’Émile Zola qui dépeint le Nord et ses mines au 19e siècle. Proche de Lille, le Centre historique minier de Lewarde propose de s’intéresser à l’épopée minière du Pas-de-Calais.

Un peu de train, de bus, puis quelques minutes de marche, c’est ce qu’il faut depuis Lille pour rejoindre le centre historique minier de Lewarde, dans les alentours de Douai. La mine de Lewarde a ouvert en 1931 pour fermer en 1971. Son intérêt réside surtout dans sa transformation en musée et en centre d’archives, lieu de mémoire unique des mines du Nord et du Pas-de-Calais.

Une mémoire minière qui s’efface, à l’époque où l’exploitation du charbon en France est révolue ? Pas tout à fait. La littérature en garde une trace parue en 1885. Germinal, c’est avant tout un roman d’Émile Zola, le treizième des Rougon-Macqart : on y suit le personnage principal Étienne Lantier qui, après s’être échappé de Lille, trouve du travail au sein d’une mine. Peu à peu, il va impliquer les autres mineurs dans une grève. Ainsi, comme le montre la série en six épisodes, la vie dans la mine était rude et dangereuse.

Germinal en 2021?

On peut se demander pourquoi retravailler de nouveau cette œuvre pour le grand public. Le roman a tout de même connu deux adaptations au cinéma, en 1967 et en 1993. Mais la série diffusée sur France 2 se veut plus proche de l’aspect documentaire résolument moderne du roman de Zola qui a commencé à écrire Germinal au moment des grèves d’Anzin en 1884. Suivant cet aspect, la nouvelle adaptation de Germinal en 2021 fait subtilement écho aux Gilets jaunes. Les mouvements sociaux qui ont eu lieu au moment de la mise en scène de Germinal résonnent dans les revendications des mineurs.

La série diffusée sur France 2 se veut plus actuelle. Pour ancrer l’œuvre dans des problématiques modernes, le réalisateur ose la diversité dans le casting, laisse plus de place aux personnages féminins : on voit au fil des épisodes que les femmes pouvaient travailler dans les fonds miniers, mais aussi subir la pression de la vie dans le coron.

© Capture d’écran France 2

Le centre historique minier de Lewarde, une vaste documentation sur le passé minier

Pour approfondir le sujet des mines, le centre historique minier de Lewarde offre une rétrospective sur les conditions de vie et de travail des mineurs. Une visite guidée y est proposée dans une reproduction de galerie où l’on peut observer les pratiques de collecte du charbon à l’époque de Germinal ainsi qu’ à une époque plus contemporaine.

Ainsi, de nombreux aspects de la mine sont expliqués. La série s’ouvre sur une scène d’explosion dans une des galeries où travaillaient les mineurs : à Lewarde, on apprend que cette explosion est liée à un coup de grisou, une décharge provoquée par un gaz chargé en méthane. Au cours de la visite de la fosse Delloy au centre historique minier, on en apprend plus sur les conditions de travail d’ouvriers des mines plus méconnus, les chevaux ; mais aussi sur le paternalisme industriel, qui a été au cœur de la vie de milliers de familles du Nord lors de la révolution industrielle.

© Clémence Demay

Participer à la mémoire et à la patrimonialisation des lieux de l’industrie minière

On a reproché à Zola de participer avec Germinal à la légende de “l’enfer du Nord”, où les hommes ont le visage noir de suie et où la pauvreté fait rage. L’adaptation télévisée joue aussi sur la noirceur à outrance. Mais cette mise en lumière de la noirceur a quelque chose d’attrayant et contribue à rappeler l’existence d’une identité industrielle.

La chargée de communication du centre de Lewarde explique que la mine n’a pour l’instant pas enregistré de hausse particulière de fréquentation suite à la diffusion de la série, mais relève tout de même un “effet Germinal” qui réactive l’intérêt porté au passé minier par le grand public. Un intérêt qui est d’abord celui des créateurs de la série. En amont du tournage, le centre historique minier, qui conserve les archives de la vie minière, a reçu la visite des équipes de création de Germinal.

Alors que la mine n’accueille pas de tournage car elle est un musée à temps plein, le confinement a permis aux équipes de Germinal de filmer des scènes complémentaires à Lewarde au début de l’année. Les trois jours de tournage intenses ont dû être préparés en amont, notamment pour adapter le décor de cette mine du XXe siècle en mine du XIXe. Le tournage de films et séries participe à la patrimonialisation des usines du bassin minier. Cela avait été le cas de l’adaptation cinématographique de Germinal par Claude Berri en 1993, qui à cette époque avait sauvé la friche de la mine d’Aramberg, en passe d’être détruite.

D’où la nécessité de voir la série : l’adaptation télévisuelle de Germinal est rendue accessible à une large audience. Un moyen de faire perdurer une mémoire ouvrière encore forte dans le Nord, tout en faisant écho aux problématiques sociales actuelles.

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