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Le festival féministe “Les Éveillées” propose des courts-métrages au public lillois

Le festival féministe “Les Éveillées” propose des courts-métrages au public lillois

festival Les Eveillées @persephoneatethefruit

Vendredi 14 janvier, le festival Les Éveillées s’installait au Black Lab à Wasquehal. Sur le grand écran défilaient des courts-métrages originaux, beaux et touchants.

Une centaine de spectateurs sont venus profiter de l’événement organisé par des étudiants lillois. Plongés tantôt dans l’obscurité, tantôt dans une décor tamisé violet, tous attendent le prochain court-métrage. Au programme : une dizaine d’œuvres féminines et féministes. Entre une bière au bar et une cigarette à l’entrée, le public s’assoit sur une chaise ou s’enfonce dans un des canapés du Black Lab pour profiter de la diversité des films proposés.

Une entrée en matière intrigante

Le festival Les Éveillées s’ouvre avec quatre court-métrages : Waves, Sans queue ni tête, On la refait ! et Le Brame. Une entrée en matière directe et vive projetant le spectateur, pour un premier temps, dans la question du féminicide. Sous des airs de film d’horreur tordu et psychédélique, Waves, de Corentin Delautre, amène à suivre une jeune femme qui semble coincée dans un monde fantasmagorique. Transportée d’un tableau à un autre, elle ne se libère que lorsque la radio révèle la terrible vérité : son propre meurtre. La femme qu’elle est a été assassinée par son mari, alors qu’elle portait leur enfant. Une façon de mettre en lumière les violences envers les femmes au sein des ménages. La violence silencieuse et brute n’est pas au goût de tous. Toutefois, c’est un travail qui mérite d’être applaudi dans la justesse de sa réalisation.

S’en suit Sans queue ni tête, de Sandra Demazières, contant une journée simple mais fade, sans véritable sens. La direction choisie par la réalisatrice est floue, ou peut-être que le but de ce court métrage est justement de finir en queue de poisson. L’œuvre est entièrement réalisée à la peinture à l’huile, à la manière des estampes japonaises. Le rendu est fluide et beau.

Les deux dernières projections relèvent d’une grande originalité. Fantine Danzer et Laura Joulia proposent une fausse publicité aux notes satiriques, avec On la refait!. Le Brame, travail de Mathilde Rabotin et Thibault Marguet, est lui, un dessin animé délicat, souligné par la solitude de l’unique personnage. Si les quatre premières œuvres n’étaient pas les plus accessibles, que cela soit dans leur ligne narratrice ou leur réalisation, on peut souligner la diversité des styles et des plumes, qui permet de voyager d’un univers à un autre, et de se perdre un peu en chemin.

Les Vagues, des vacances entre amis rythmées par la maladie

Dans le bar Black lab, teinté de violet pour l’occasion du festival, il y a un joyeux mélange de chaises et de canapés confortables, tout comme de personnes de tous les âges, de toutes les nationalités. 

Dans ce cadre cosmopolite, le premier court métrage réalisé par Jeanne Dantoine et produit par sa meilleure amie Alice Perrault, Les Vagues, se dévoile. Interviewée dans le cadre du festival, la réalisatrice met en lumière les difficultés de produire un court-métrage, bien que le format permette de s’affirmer. Selon Jeanne, le cinéma est en elle : “au-delà d’être une femme, je suis une réalisatrice.” Elle n’en demeure pas moins féministe.

Au-delà d’être une femme, je suis une réalisatrice. – Jeanne Dantoine

Le film a reçu, le 30 novembre 2021, le prix du public du Festival Cours Charlie, Courts.  Les Vagues traduit le besoin d’exprimer le vécu de l’entourage d’une personne malade. La maladie ne porte d’ailleurs par de nom, ce n’est pas le sujet du film.

Affiche de Les Vagues, l'un des courts-métrages présentés par le festival Les Eveillées © Jeanne Dantoine
Affiche de Les Vagues, l’un des courts-métrages présentés par le festival Les Eveillées © Jeanne Dantoine

Le court-métrage débute. L’été semble bien installé, la nature est radieuse, fleurit. La piscine est arborée d’un jardin du sud, le monde est beau. Le cadre est léger, mais les ressentis sont lourds. Jules s’approche de Gabriel, lui fait remarquer que Mia va bien. Les sourires et les rires sont sur les visages. Mais soudain, l’arrivée de Mia crée une gravité à laquelle le spectateur ne s’attend pas. Au fil du film, les spectateurs voyagent dans la peau de Gabriel qui inhibe de plus en plus son ressenti pour s’assurer de ne pas peser sur Mia.

Le spectateur oscille entre sons heureux et zooms pesants sur Gabriel, à l’image de son enfoncement, son effacement, bien que son entourage soit présent. Mia ne semble plus avoir la force d’être présente pour lui que par intermittence. La situation pèse sur Gabriel. Le public est noyé en même temps que lui dans les méandres de l’incompréhension, de la colère mais aussi d’une profonde tristesse, d’un regret du cadre plus joyeux du début du film car il s’agit bien d’un besoin constant de retrouver les moments heureux, qui amène de plus en plus Gabriel à s’oublier. Jeanne Dantoine libère les ressentis des proches et nous offre une balance équilibrée, ce qui évite une culpabilisation établie sur l’entourage ou Mia.

Votre correspondant n’est pas disponible, la tragédie douce 

“Ne rentre pas trop tard ce soir”, “Ne m’attend pas pour manger”, “Hey rappelle-moi”, les voix déformées et robotiques d’une messagerie électronique s’enchaînent tandis qu’à l’écran une jeune fille fait du piano. Qui est-elle ? Pourquoi ne répond-t-elle pas ? Les messages narrent-t-ils les images ? À travers ce court-métrage bouleversant et très bien mené, Rachel Dano, partage un deuil et fait pleurer le temps d’une vingtaine de minutes la perte d’un être cher.

Presque sans qu’aucune parole ne soient échangées à l’écran, le fond sonore est ponctué des messages du répondeur téléphonique entre une mère et sa fille qui ne réussissent jamais à se joindre. Soirée, sortie, fuite et fugue, le spectateur vit le bonheur éphémère de la protagoniste face à ses souvenirs sonores et sa vie présente. Les couleurs vives et orangées au début s’assombrissent à mesure que la nuit tombe. Le personnage central du court-métrage, Maya, est une femme d’une vingtaine d’année. Presque toujours montrée seule, on la voit vagabonder au fil de sa journée et se perdre comme si rien n’avait changé dans sa vie avant de la voir sombrer en soirée lorsque le spectateur saisit enfin la signification des audios qu’il écoute. 

Votre correspondant n’est pas disponible s’inscrit dans le festival féministe grâce à son autrice et scénariste qui parviennent à transmettre des émotions sans presque jamais montrer le chagrin à l’écran. Elles font ressentir progressivement toutes les états d’âme traversés par la protagoniste et les étapes du deuil. Le court-métrage donne une belle vision du deuil et du souvenir tout en alliant technique et jeu d’acteurs.

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