Festival de Cannes : le palmarès du jury de la 75ème édition
Ce samedi 28 mai, la 75ème édition du festival de Cannes arrivait à son terme après une dizaine de jours animés par projections, montées des marches et conférences de presse. Présidé par l’acteur français Vincent Lindon, le jury a couronné le réalisateur suédois Ruben Östlund pour sa comédie Triangle of Sadness de la prestigieuse Palme d’Or, ou encore le jeune Lukas Dhont et, la brillante Claire Denis du Grand Prix. Retour sur le palmarès qui signe la fin de la 75ème édition de la manifestation cinématographique la plus iconique au monde.
Dans le cadre de la traditionnelle cérémonie de clôture du festival de Cannes animée cette année par la talentueuse Virginie Efira, le jury de la 75ème édition décerne ses prix, très divisé après onze jours de festival rythmés par un enchaînement de films pour la plupart très applaudis. La sélection offrait en effet à son public une diversité impressionnante de propositions cinématographiques, mettant à l’honneur des cinéastes du monde entier dans cette compétition ardue.
Seconde Palme d’or décernée à Ruben Östlund
Succédant au controversé Titane de Julia Ducournau, Triangle of Sadness apporte à son réalisateur Ruben Östlund sa seconde récompense suprême, après The Square en 2017. Il rejoint ainsi les rangs d’un club presque impénétrable de neuf membres, qui ont pour point commun de détenir la Palme d’Or pour deux de leurs oeuvres : Shohei Immamura, Francis Ford Coppola, Jean-Pierre et Luc Dardenne, Bille August, Emir Kusturica, Michael Haneke et Ken Loach.
Satire provocante d’une société chiffonnée par un schisme entre les classes sociales, cette comédie suédoise amène une bouffée d’air frais sur la Croisette. Venu s’en prendre à la société occidentale pour son premier film tourné en anglais, Ruben Östlund propose une oeuvre décalée qui ne manquera pas de faire réagir son public, oscillant entre Titanic et la Grande Bouffe, selon les dires.
La Belgique a le vent en poupe
Face à une sélection composée d’œuvres brillantes et audacieuses, le jury s’éblouit, si bien qu’il n’a pas souhaité départager ses candidats à deux reprises, pour le Prix du Jury et le Grand Prix.
Parmi les grands favoris de la compétition, on comptait Armageddon Time du réalisateur américain James Gray, aux côtés de Hi-Han de Jerzy Skolimowski, La femme de Tchaïkovksi de Kirill Serebrennikov, grand opposant au régime russe, ou Close du jeune belge Lukas Dhont. Second-long métrage d’un cinéaste à la carrière prometteuse, Close a su envoûter le public, suscitant une standing ovation longue de douze minutes, à l’issue de sa projection au Grand Théâtre Lumière. Lui aussi subjugué par cette toute fraîche proposition de cinéma, le jury décore Lukas Dhont de son prestigieux Grand Prix, ex-aequo avec Stars at Noon de Claire Denis, réalisatrice et scénariste française qui n’a plus rien à prouver au septième art.
Cette édition semble porter chance à la Belgique, puisque deux autres films belges ont excellé, coiffés du Prix du Jury. À nouveau divisés face à des prétendants aux projets alléchants, Vincent Lindon et ses pairs ont choisi de récompenser le bouleversant Hi-Han de Jerzy Skolimowski, ainsi que le sublime Le Otto Montagne, film franco-italo-belge co-réalisé par Felix Van Groeningen et Charlotte Vandermeersh, inspiré du roman italien du même nom de Paolo Cognetti.
La Corée du Sud enchaîne les succès
Côté interprètes, l’iranienne Zar Amir Ebrahaimi vole la vedette à Kristen Stewart, grande favorite pour son rôle dans Les Crimes du Futur de David Cronenberg. Dans Holy Spider, thriller du cinéaste irano-danois Ali Abbas, elle incarne une journaliste confrontée à une société iranienne rigide et patriarcale, secouée par des meurtres répétés de prostituées. « Ce film parle des femmes, de leur corps, ce film est rempli de haine, de mains, de seins, tout ce qu’on ne peut pas montrer en Iran. Merci Ali Abassi d’avoir été si fou, si généreux. Merci de cet art si puissant« , déclarait-elle après son sacre, elle qui fut contrainte de fuir son pays en 2008 suite à un scandale.
Si les yeux étaient rivés sur Eden Dambrine, 15 ans, qui crève l’écran dans Close, la jeune révélation voit le prix d’interprétation masculine lui glisser entre les doigts, finalement offert à la star sud-coréenne Song Kang-Ho pour sa performance bluffante dans Broker de Hirokazu Kore-Eda. L’acteur fétiche du réalisateur coréen Bong Joon-Ho y interprète un patron de pressing impliqué dans un trafic de bébés, qui va former au fil des kilomètres d’un road trip captivant une famille fusionnelle. Après le succès fulgurant de Parasite qui ravit la Palme d’or en 2019, la nouvelle vague du cinéma sud-coréen continue sur sa lancée : le prix de la mise en scène est attribué au cinéaste acclamé par la critique, Park Chan-Wook, avec son nouveau long-métrage Decision to Leave.
Quant au reste du palmarès révélé ce samedi par le jury, Boy From Heaven de Tarik Saleh repart avec le prix du scénario, War Pony de Riley Keough avec la Caméra d’or, prix réservé aux jeunes réalisateurs pour leurs premiers films, ou encore Plan 75 de la cinéaste japonaise Hayakawa Chie avec la mention spéciale. Duo emblématique, les frères Dardennes ne sont pas non plus repartis les mains vides, puisque le prix spécial du 75ème anniversaire leur a été remis pour Tori et Lokita, leur treizième long-métrage de fiction. Toutes catégories confondues, cette récompense vient s’ajouter aux huit autres que les cinéastes ont reçues au festival depuis 1999.