Avec « Hollywood », Ryan Murphy réécrit l’histoire du cinéma des années 40
On n’arrête plus le créateur de Glee. Sous contrat avec Netflix depuis 2017 pour une durée de cinq ans, Ryan Murphy entame sa deuxième série pour la plateforme. Après The Politician, il s’attaque au glamour hollywoodien et le redessine en une utopie qui fait du bien au moral.
Après la Seconde Guerre mondiale, à l’époque où les célèbres lettres « Hollywood » sont encore suivies du mot « Land », le monde se reconstruit. Hollywood est en pleine effervescence et de nombreux jeunes gens y emménagent pour tenter d’y faire carrière. On suit alors le parcours de Jack, Archie, Camille, Raymond, Roy et Claire qui veulent tous prendre part à cette industrie qui les fait tant rêver. Acteurs, scénaristes ou réalisateurs, ils souhaitent percer dans le monde du cinéma et devenir des stars.
Hollywood fantasmé
Tous liés les uns aux autres, nos protagonistes vont tenter de se frayer un chemin dans une industrie où l’intolérance fait rage. En effet, les femmes étaient mises de côté et souvent cantonnées à des rôles d’épouses. Les acteurs homosexuels ne pouvaient pas dévoiler leur sexualité sous peine d’être mis sur liste noire. Les personnes ayant des origines jouaient des personnages clichés et n’obtenaient jamais de premier rôle. Anna May Wong, actrice sino-américaine, en subit les conséquences lorsque Metro-Goldwin-Mayer rejeta sa candidature au profit de celle de Luise Rainer pour le film Visages d’Orient. Le code de production du cinéma américain interdisant à l’époque tout geste intime entre différentes ethnies, on donna à Rainer une apparence orientale pour qu’elle puisse jouer avec son partenaire masculin blanc.
La production d’un film qui casse tous les codes de l’époque va être le moteur de la série de Ryan Murphy. Une femme noire en est l’actrice principale, le scénariste est un homme noir et un rôle est attribué à l’actrice déchue Anna May Wong. Toutes les minorités vont être représentées à l’écran. Le réalisateur, Raymond Ainsley, explique très bien son intention dès le premier épisode : « Les films sont des précurseurs pour faire évoluer les mentalités ». À travers son film, il souhaite pouvoir représenter les différentes populations qui constituent son pays et donner de l’espoir à toutes les minorités qui pensaient certaines portes fermées. Accompagné de quelques uns de ses acteurs fétiches comme Darren Criss (Glee, American Crime Story) ou Dylan McDermott (American Horror Story) mais également de nouvelles têtes comme Jim Parsons (The Big Bang Theory), Murphy parvient à nous transporter dans son univers idéal.
Un long chemin reste à faire
Cependant, bien qu’instructive cette histoire n’est qu’un rêve. Anna May Wong n’a jamais été admirée à sa juste valeur et très peu d’acteurs ouvertement homosexuels sont parvenus à être oscarisés. La première Afro-Américaine à remporter l’Oscar de la meilleure actrice fut Halle Berry en 2002. Le cinéma des années 1940 était rempli d’inégalités qui ont perduré pendant de nombreuses années encore. Si aujourd’hui la situation s’est améliorée, il y a encore une très grande marge de progression. Trop peu d’acteurs issus des minorités sont récompensés et mis en avant par l’industrie. L’absence récurrente de femmes dans la catégorie de la meilleure réalisation en est encore une preuve. Quand on regarde l’Académie des Oscars et qu’on remarque qu’elle est composée à plus de 85% de personnes blanches et à 70% d’hommes, le choix des récompensés a soudain plus de sens.
La victoire retentissante de Bong Joon-ho avec Parasite cette année ou bien celle de Barry Jenkins avec Moonlight en 2017 semblent prouver que l’Académie et Hollywood progressent. Mais il faudra encore beaucoup plus pour avoir une égalité parfaite. En attendant, Hollywood, la nouvelle série de Ryan Murphy, nous régale par sa photographie remarquable qui ravira tous les cinéphiles et nous laisse percevoir une industrie qui pourrait, un jour, devenir réellement juste.